Un jour, le vent soufflera vivement sur la terre, et s'envoleront dans les arbres les innombrables légers : timides, SDF, artistes, artisans, paumés, exilés, poètes, rêveurs, pauvres, femmes battues, ouvriers exploités, travailleurs fatigués, enfants mal nourris, familles sous les bombes, handicapés, philosophes, chercheurs conscients, maîtres à penser libre, militants sociaux ou humanitaires, représentants sincères du peuple,...
Resteront sur le sol, les nombreux lourds : riches de plus en plus, petits cons, gros cons, intégristes de tout poil, intégristes sans poil, mercenaires, tortionnaires, maffieux, trafiquants de drogues et d'armes, spéculateurs, voleurs de terres, dirigeants de multinationales, empoisonneurs par pesticides ou particules mortelles, maltraiteurs d'animaux, fascistes, racistes, sexistes, homophobes, politicards intéressés uniquement par eux-mêmes, chiens de garde, appauvrisseurs de la langue, petits chefs, roitelets, empereurs, dictateurs, déclencheurs de guerre,...
Quand le vent sera calmé, la terre tremblera pour enterrer les lourds.
Il ne restera plus qu'à secouer les arbres pour récolter de l'humanité et la faire fructifier.
(Extrait de
Interventions à Haute Voix, n°53 Décembre 2014)
29 janvier 2015
La religion des parents
J'ai personnellement eu beaucoup de mal à me dessaisir de l'emprise de mon éducation catholique. Un des drames de la situation de notre monde actuel est que la religion se maintient surtout grâce aux parents. Si seulement ceux-ci étaient capables de dire aux enfants qu'ils sont libres de choisir leur croyance. C'est pourquoi je suis sensible à toute action qui va dans ce sens. Telle celle de Lilian Thuram racontée dans cet extrait :
''Ils sont une petite centaine, assis dans l'amphithéâtre de leur lycée, Paul-Eluard, à Saint-Denis (93). Trois classes de première et terminale, face à l'ancien footballeur Lilian Thuram, qui a créé en 2008 la fondation Education contre le racisme. On parle égalité des Noirs et des Blancs, des hommes et des femmes, mariage pour tous, laïcité. «
On a toujours tendance à reproduire ce qu'on a reçu, et le conditionnement religieux est le plus puissant. Qui a la même religion que ses parents ? » interroge Thura. Toutes les mains se lèvent. «
C'est obligé, monsieur ! - Mais non. Il faut toujours questionner ce qu'on croit, penser librement, par soi-même ».''
(Extrait de
Ici on prend les élèves aux mots, Weronika Zarachowicz, Télérama, 31 janvier - 7 février 2015)
20 janvier 2015
Introduction de l'histoire des religions à l'école
A propos de l'introduction de l'histoire des religions à l'école, voilà ce que notre professeur d'histoire de la classe de 5ème du ''cours complémentaire'' de Pantin en 1945-1946 nous faisait copier sur notre cahier, qu'il corrigeait et notait ensuite, pour l'exactitude, le soin, les dessins, et les cartes. (cahier conservé).
L'Orient arabe, Mahomet
Isolée et pauvre, vouée au culte des idoles, dépourvue d'unité politique, l'Arabie connut au début du 7ème siècle, grâce à la venue de Mahomet, un sort exceptionnel. Sans fortune et orphelin, Mahomet, né vers 570, probablement à La Mecque, ne semble pas destiné à jouer un grand rôle. Mais il épouse une riche veuve, Hhadidja, croit avoir des visions(611) et se met à prêcher sur un ordre qu'il dit venir d'ALLAH. Devant l'hostilité d'une grande partie des gens de La Mecque, il se réfugie à Médine [Hégire (émigration) 622]. Après une guerre de razzias, Mahomet rentre à La Mecque et impose sa doctrine à la plus grande partie de la péninsule. Il meurt en 632.
La doctrine de Mahomet, contenue dans le CORAN (récitation), repose sur la croyance à Allah dont Mahomet est le prophète. Elle présente avec le Christianisme et le Judaïsme de grandes analogies (croyance aux anges et démons, immortalité de l'âme, jugement dernier, Paradis, Enfer). Le culte consiste dans la prière, le jeûne, l'aumône et l'accomplissement au moins une fois dans sa vie, d'un pèlerinage à La Mecque.
6 mars 2014
Le traité transatlantique, un typhon qui menace les Européens
Engagées en 2008, les discussions sur l'accord de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne ont abouti le 18 octobre. Un bon présage pour le gouvernement américain, qui espère conclure un partenariat de ce type avec le Vieux Continent. Négocié en secret, ce projet ardemment soutenu par les multinationales leur permettrait d'attaquer en justice tout Etat qui ne se plierait pas aux normes du libéralisme.
Imagine-t-on des multinationales traîner en justice les gouvernements dont l'orientation politique aurait pour effet d'amoindrir leurs profits ? Se conçoit-il qu'elles puissent réclamer - et obtenir ! - une généreuse compensation pour le manque à gagner induit par un droit du travail trop contraignant ou par une législation environnementale trop spoliatrice ? Si invraisemblable qu'il paraisse, ce scénario ne date pas d'hier. Il figurait déjà en toutes lettres dans le projet d'accord multilatéral sur l'investissement (AMI) négocié secrètement entre 1995 et 1997 par les vingt-neuf Etats membres de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) (1). Divulguée in extremis, notamment par Le Monde diplomatique, la copie souleva une vague de protestations sans précédent, contraignant ses promoteurs à la remiser. Quinze ans plus tard, la voilà qui fait son grand retour sous un nouvel habillage.
L'accord de partenariat transatlantique (APT) négocié depuis juillet 2013 par les Etats-Unis et l'Union européenne est une version modifiée de l'AMI. Il prévoit que les législations en vigueur des deux côtés de l'Atlantique se plient aux normes du libre-échange établies par et pour les grandes entreprises européennes et américaines, sous peine de sanctions commerciales pour le pays contrevenant, ou d'une réparation de plusieurs millions d'euros au bénéfice des plaignants.
D'après le calendrier officiel, les négociations ne devraient aboutir que dans un délai de deux ans. L'APT combine en les aggravant les éléments les plus néfastes des accords conclus par le passé. S'il devait entrer en vigueur, les privilèges des multinationales prendraient force de loi et lieraient pour de bon les mains des gouvernants. Imperméable aux alternances politiques et aux mobilisations populaires, il s'appliquerait de gré ou de force, puisque ses dispositions ne pourraient être amendées qu'avec le consentement unanime des pays signataires. Il dupliquerait en Europe l'esprit et les modalités de son modèle asiatique, l'accord de partenariat transpacifique (Trans-Pacific Partnership, TPP), actuellement en cours d'adoption dans douze pays après avoir été ardemment promu par les milieux d'affaires américains. A eux deux, l'APT et le TPP formeraient un empire économique capable de dicter ses conditions hors de ses frontières : tout pays qui chercherait à nouer des relations commerciales avec les Etats-Unis ou l'Union européenne se verrait contraint d'adopter telles quelles les règles qui prévalent au sein de leur marché commun.
...
Il est d'ores et déjà stipulé que les pays signataires assureront la « mise en conformité de leurs lois, de leurs règlements et de leurs procédures » avec les dispositions du traité. Nul doute qu'ils veilleront scrupuleusement à honorer cet engagement. Dans le cas contraire, ils pourraient faire l'objet de poursuites devant l'un des tribunaux spécialement créés pour arbitrer les litiges entre les investisseurs et les Etats, et dotés du pouvoir de prononcer des sanctions commerciales contre ces derniers.
...
Les normes de qualité dans l'alimentation sont elles aussi prises pour cible. L'industrie américaine de la viande entend obtenir la suppression de la règle européenne qui interdit les poulets désinfectés au chlore. A l'avant-garde de ce combat, le groupe Yum !, propriétaire de la chaîne de restauration rapide Kentucky Fried Chicken (KFC), peut compter sur la force de frappe des organisations patronales. « L'Union autorise seulement l'usage de l'eau et de la vapeur sur les carcasses », proteste l'Association nord-américaine de la viande, tandis qu'un autre groupe de pression, l'Institut américain de la viande, déplore le « rejet injustifié [par Bruxelles] des viandes additionnées de bêta-agonistes, comme le chlorhydrate de ractopamine ».
La ractopamine est un médicament utilisé pour gonfler la teneur en viande maigre chez les porcs et les bovins. Du fait de ses risques pour la santé des bêtes et des consommateurs, elle est bannie dans cent soixante pays, parmi lesquels les Etats membres de l'Union, la Russie et la Chine. Pour la filière porcine américaine, cette mesure de protection constitue une distorsion de la libre concurrence à laquelle l'APT doit mettre fin d'urgence.
« Les producteurs de porc américains n'accepteront pas d'autre résultat que la levée de l'interdiction européenne de la ractopamine », menace le Conseil national des producteurs de porc (National Pork Producers Council, NPPC). Pendant ce temps, de l'autre côté de l'Atlantique, les industriels regroupés au sein de BusinessEurope dénoncent les « barrières qui affectent les exportations européennes vers les Etats-Unis, comme la loi américaine sur la sécurité alimentaire ». Depuis 2011, celle-ci autorise en effet les services de contrôle à retirer du marché les produits d'importation contaminés. Là encore, les négociateurs de l'APT sont priés de faire table rase.
Il en va de même avec les gaz à effet de serre. ...
Mais c'est dans le secteur de la finance que la croisade des marchés est la plus virulente. Cinq ans après l'irruption de la crise des subprime, les négociateurs américains et européens sont convenus que les velléités de régulation de l'industrie financière avaient fait leur temps. Le cadre qu'ils veulent mettre en place prévoit de lever tous les garde-fous en matière de placements à risques et d'empêcher les gouvernements de contrôler le volume, la nature ou l'origine des produits financiers mis sur le marché. En somme, il s'agit purement et simplement de rayer le mot « régulation » de la carte. ...
Lori M. Wallach, novembre 2013
Le Monde diplomatique février 2014
30 janvier 2014
POISSON ET POULET
Si vous donnez de la farine de poisson aux poulets, ceux-ci ont un goût de poisson.
Si vous élevez des poulets aux hormones, il en résulte des inconvénients pour le consommateur mâle qui se voit pousser des appâts non prévus par la nature : où les hommes sont ?
Si vous nourrissez vos poulets à la fois avec cette farine et ces hormones, vous obtenez des poissons munis de seins qu'on appelle des sirènes.
Les appâts des sirènes attirent les maquereaux
et vous voyez revenir les poulets
et vous entendez leur sirène.
.
Guy Chaty
Poésie de langue française, Anthologie thématique de Jean Orizet, cherche midi 2013
8 janvier 2014
En Europe, deux cents villes restreignent leur accès aux véhicules polluants
La France n'est toujours pas dotée de zones à faibles émissions
La mesure entre en vigueur le 10 janvier : pour limiter la pollution atmosphérique, la vitesse sur le périphérique est abaissée de 80 à 70km/h...C'est une mesure attendue mais qui ne comblera pas le retard de la France dans sa lutte pour l'amélioration de la qualité de l'air.
Ailleurs des dispositifs beaucoup plus contraignants ont été adoptés...
L'obectif recherché est partout le même : réduire la pollution atmosphérique pour respecter les valeurs limites de la réglementation européenne sur la qualité de l'air...
Ce sont généralement les poids lourds, les bus et autocars, véhicules encombrants et fiugurant parmi les plus polluants, qui sont visés par les mesures de restriction. Mais l'Allemagne va au-delà...
La mise en place d'un tel dispositif s'accompagne souvent de protestations, notamment des organisations de chauffeurs routiers. Mais l'impact sur la qualité de l'air est loin d'être négligeable. "Dans tous les cas , des réductions sont observées sur les concentrations en dioxyde d'azote et en PM10", souligne Gilles Aymoz
(responsable du service qualité de l'air à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie). Concernant ces particules fines extrêmement nocives pour la santé, les résultats obtenus sont spectaculaires : des baisses de 40% ont été enregistrées...
"Dans l'Hexagone,..., la mise en place de zones d'actions prioritaires pour l'air a bloqué sur une question de faisabilité sociale. Les pays où de telles zones se sont développées se sont posé moins de questions : ils ont observé des dépassements d'émissions de polluants et ont décidé d'agir. C'est une question de priorité politique"
.
Laetitia Van Eeckhout, Le Monde, 5-6 janvier 2014
11 décembre 2013
STYLO A PLUMES
Sur un trop fort appui
les deux parties de la plume
s'écartent
et - mort de la plume -
elles deviennent
ailes d'oiseau
à deux plumes
violacées - souvenir d'encre -
Vol au-dessus du papier
blanc
griffé
Viol et la feuille
- mort du papier -
devient chiffon
que l'oiseau fauche
comme le font
violents
les enfants
Il ne reste rien
que le stylo posé
sur la table de bois
.
Guy Chaty
Concerto pour marées et silence, N°6 2013
18 novembre 2013
Poubelle nucléaire de Bure : mensonges confirmés !
Depuis des années, l'industrie nucléaire place ses pions pour créer une poubelle nucléaire à Bure (Meuse / Haute-Marne). Un cabinet d'experts de renommée internationale vient de confirmer les révélations des antinucléaires : l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a caché les analyses géologiques qui démontrent qu'une abondante ressource géothermique se trouve sous le site de Bure. Sa présence devrait interdire l'enfouissement de déchets nucléaires.
.
Réseau Sortir du nucléaire, 3 novembre 2013
10 octobre 2013
UNE NOUVELLE PARTICULE
Aujourd'hui, on sait que la matière est composée de molécules, assemblages d'atomes, et que l'atome lui-même est fait de particules : protons, neutrons, électrons, positrons, mésons, muons, nucléons, neutrinos, photons,...entre lesquelles il existe des forces de natures variées.
La force qui nous est la plus familière, dès la naissance, puisqu'elle nous entraîne tout de suite vers le sol, est la gravitation. Elle serait peut-être due à une particule : le graviton. Mais cette particule n'a pu encore être mise en évidence.
Or, on ne s'est pas encore penché sur la force qui entraîne les hommes et les femmes les uns vers les autres, qui les pousse à entreprendre, à créer, à chercher.... On appelle cette force irrésistible : le désir, l'amour, la libido,..
J'émets l'hypothèse que cette force est due à une particule que je nommerais : le libidon. On y fait d'ailleurs allusion sans le savoir quand on dit de deux personnes attirées l'une vers l'autre qu'elles ont des "atomes crochus" !
On sait qu'à chaque particule de la matière correspond son antiparticule dans l'antimatière : à l'électron, le positron, au neutron, l'antineutron. De même, je pense qu'au libidon est associé l'antilibidon. Ainsi s'expliqueraient les forces de répulsion et de haine.
Quand particule et antiparticule se rencontrent, leurs charges électriques s'annulent : particule et antiparticule disparaissent au profit d'une forme "neutre" en dégageant une forte énergie. Ainsi électron et positron donnent des photons, proton et antiproton : mésons ou photons.
Comme l'homme et la femme renferment en eux-mêmes une grande quantité de libidons et d'antilibidons, se livre en leur sein un combat incessant qui dégage une énergie considérable. Soit celle-ci reste intérieure et détruit le bien-être du sujet, soit elle s'exprime à l'extérieur et menace la sécurité des autres, et cela jusqu'à l'épuisement de l'énergie.
Et quel est le produit de la transformation de ces deux particules ? Bien souvent maladies et massacres, refoulements et guerres.
Heureusement, certains humains semblent avoir plus de libidons que d'antilibidons. Pour d'autres, hélas, c'est l'inverse.
Il est grand temps de s'intéresser au sujet !
.
Guy Chaty
Coups d'oeil en coulisse, D'ici et d'ailleurs 20O8
10 septembre 2013
Présentation de "La violence des riches"
Sur fond de crise, la casse sociale bat son plein : vies jetables et existences sacrifiées. Mais les licenciements boursiers ne sont que les manifestations les plus visibles d'un phénomène dont il faut prendre toute la mesure : nous vivons une phase d'intensification multiforme de la violence sociale.
Mêlant enquêtes, portraits vécus et données chiffrées, Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot dressent le constat d'une grande agression sociale, d'un véritable pilonnage des classes populaires : un monde social fracassé, au bord de l'implosion.
Loin d'être l'oeuvre d'un « adversaire sans visage », cette violence de classe, qui se marque dans les têtes et dans les corps, a ses agents, ses stratégies et ses lieux. Les dirigeants politiques y ont une part écrasante de responsabilité. Les renoncements récents doivent ainsi être replacés dans la longue histoire des petites et grandes trahisons d'un socialisme de gouvernement qui a depuis longtemps choisi son camp.
À ceux qui taxent indistinctement de « populisme » toute opposition à ces politiques qui creusent la misère sociale et font grossir les grandes fortunes, les auteurs renvoient le compliment : il est grand temps de faire la critique du « bourgeoisisme ».
Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot
La découverte, 2013
26 juillet 2013
LA DIFFERENCE DES SEXES
Quand l'homme ou la femme dans la nature se soulagent d'un besoin pressant, ce n'est pas le même paysage qu'ils découvrent l'un et l'autre dans l'exercice de leur miction.
L'un, debout, remarque les feuilles vertes ou rousses des arbres à quelque pas devant lui, ou bien encore au loin le clocher d'une église ; l'autre, accroupie, note au ras du sol les insectes se livrant à leurs acrobaties sur des herbes souples qu'ils font ployer sous leur poids léger, au milieu de minuscules fleurs naissant de la terre. Gagnés à la contemplation pour quelques instants, et de manière inattendue, ils quittent à regret, émerveillés, leur bref séjour.
S'ils sont deux promeneurs en marche commune, chacun révèle à l'autre sa récolte fortuite, doublant ainsi leur plaisir, grâce à la différence des sexes. Ils peuvent même pousser leur conversation sur un terrain philosophique, en méditant sur cette différence qui les met en position de découvrir deux mondes différents : l'un proche et plein de vie grouillante, l'autre attirant par ses perspectives, son appel à la connaissance...Et ils se disent que, finalement, il ne leur est pas interdit, à l'un comme à l'autre, de changer de posture à l'occasion, et de profiter chacun des révélations de l'autre. La nature brute au service de l'esprit de finesse.
Guy Chaty
Coups d'oeil en coulisses, D'Ici et D'AilleurS, 2008
12 juin 2013
Retraites : assez de mensonges, place à un vrai débat !
Une obsession récurrente anime les gouvernements depuis vingt ans : réformer les retraites. En France, le gouvernement Hollande-Ayrault projette une quatrième réforme à l'automne prochain en raison de trois arguments qui sont de faux prétextes : il y aurait un déficit plus important que prévu des caisses de retraites ; on vit plus longtemps et il faudrait travailler plus longtemps ; la Commission européenne l'exige pour ramener les déficits publics à 3 % du PIB. Le rapport présenté par Mme Yannick Moreau propose des solutions qui sont dans le droit fil des réformes précédentes ayant conduit à une diminution importante du montant des pensions sans résoudre aucun problème à long terme.
1) Les déficits annoncés des caisses de retraite (autour de 14 milliards en 2012, environ 20 en 2020) n'ont rien à voir avec le vieillissement de la population...
2) Obliger à travailler plus longtemps, soit en allongeant la durée de cotisation, soit en retardant l'âge de la retraite, soit par les deux moyens à la fois, alors qu'un chômage croissant sévit, est aussi cynique qu'absurde ...De plus, [ces obligations] s'inscrivent dans un modèle de développement productiviste arrivé aujourd'hui dans une impasse, mais qui condamne les individus à travailler toujours plus.
3) Les propositions du rapport Moreau font mine d'appeler toutes les catégories à faire des efforts, mais on voit bien que l'essentiel sera mis sur le dos des salariés et des actuels retraités....
ce rapport fait le silence complet sur le bond en avant des revenus du capital qui plombent l'activité, l'investissement, l'emploi et la protection sociale. Au bas mot, le « surcoût » du capital pour la société se chiffre à 100 milliards d'euros de dividendes supplémentaires par an, en comparaison avec l'époque précédant l'ère néolibérale.
Quand une véritable réflexion sur ces données infléchira-t-elle les politiques sociales à venir ?
Attac et la Fondation Copernic proposeront une action collective à tous leurs partenaires pour qu'un vrai débat de société s'amorce enfin sur la retraite et la place du travail dans la vie.
Attac
Paris, le 11 juin 2013
18 mai 2013
LES MARCHES
En montant 22 marches, on gagne, paraît-il, un bénéfice de santé qui peut s'évaluer à 40 secondes de vie supplémentaires.
Je ne peux plus effacer cette nouvelle de mon esprit.
J'ai décidé de passer tout mon temps disponible à escalader les escaliers et les montagnes.
Si je veux une année de plus, je dois grimper.17 344 800 marches, c'est-à-dire 17 345 fois le Mont Aigoual par les mille marches, ou bien 192 720 fois l'escalier qui m'élève à mon appartement.
Ces calculs m'ont demandé une cinquantaine de marches : je transpose maintenant mon temps en marches ou convertis les marches en temps, suivant les circonstances. Rater une marche, non, perdre deux secondes ; se dépêcher devient: "monter les marches quatre à quatre "; je ne vais plus au cinéma voir "les 39 marches" mais les "soixante dix secondes".
Je constate avec regret que si je ne monte pas, je perds de la vie que j'aurais pu gagner.
Je ne me déplace plus à Paris qu'en métro et j'évite les escaliers roulants. Je méprise les autobus et les ascenseurs. Si je dois aller dans une ville, je m'enquiers immédiatement sur l'existence d'un métro. Je cherche les rues à escaliers et déplore leur disparition.
Et tout ce temps que je vais gagner à monter ? Tel un bon joueur en bourse, je vais le réinvestir en marches, essayant ainsi de faire fructifier mon placement. 22 marches me procurent 40 secondes qui, si je cours, peuvent se convertir en 100 marches, qui elles-mêmes se changent en 200 secondes, etc.Cela devient affolant: je ne me contente plus de monter, je cours en montant, et de plus en plus vite, courant après toujours davantage de gain de durée de vie.
Je me demande parfois si je ne risque pas l'infarctus, qui pourrait me faire monter directement au ciel !
Guy Chaty
Contes cruels , Editinter, 1998
25 avril 2013
Les nouveaux chemins de la prospérité
Il fut un temps où la croissance guérissait tous les maux. Après les destructions massives et les millions de morts de la Seconde Guerre mondiale, les Etats-Unis, l'Europe et le Japon virent en elle la panacée capable de panser leurs plaies et de porter leur prospérité à des niveaux sans précédent dans l'histoire de l'humanité. Un cercle vertueux unit alors la production industrielle à la consommation de masse, l'augmentation des profits des entreprises à l'amélioration continue de la condition des salariés. Et le développement de l'Etat-providence vint couronner cet âge d'or.
Mais cette belle machine s'est grippée il y a quarante ans, à la faveur des chocs pétroliers. La mondialisation, l'emprise croissante de la finance sur l'économie, mais aussi l'épuisement des bénéfices de la modernisation menée durant les Trente Glorieuses ont provoqué un changement de régime de la croissance. Plus lente dans les pays riches, et particulièrement en Europe, celle-ci se concentre désormais dans les pays du Sud (pas tous.), qui entament enfin leur rattrapage. Surtout, elle semble devenue plus volatile et, même si elle a tiré des millions de personnes de la pauvreté au Sud, elle se satisfait désormais des inégalités qui prospèrent de nouveau au Nord et préparent de nouvelles crises économiques et sociales. Enfin, elle montre chaque jour un peu plus son coût pour l'environnement, mettant en péril la capacité de la planète à se ressourcer et donc l'avenir même de nos sociétés.
Malgré cela, les dirigeants européens veulent croire encore au retour de l'âge d'or...Leur quête apparaît d'autant plus vaine que la chape de plomb de l'austérité qu'ils font peser sur leurs économies produit l'effet tout à fait contraire de celui recherché. En Espagne, en Grèce ou au Portugal, les peuples font l'expérience grandeur nature de la décroissance. Celle-ci désorganise durablement leurs économies et met à rude épreuve la cohésion de leurs sociétés. Partout en Europe, le chômage s'installe à des niveaux inédits, gâchant de précieuses compétences et semant le désespoir.
Mais il ne suffira pas que nos responsables politiques relâchent l'étau de l'austérité. Il leur restera, tâche plus ardue encore, à changer de logiciel. La croissance n'est pas une fin en soi, mais un moyen au service du bien-être de la société. Par conséquent, la croissance de demain ne peut plus ressembler à celle d'hier.
Il faut en tirer deux conclusions. Premièrement, la "croissance verte" n'est pas seulement affaire de panneaux solaires et d'éoliennes. Elle passe par une réorganisation profonde de l'économie, afin qu'elle trouve une harmonie avec les écosystèmes naturels et prenne enfin en compte leurs limites.
Deuxièmement, sauf surprise, la croissance de demain sera inévitablement plus lente que celle des Trente glorieuses. Son rythme élevé ne pourra servir de cache-misère aux inégalités : celles créées depuis trente ans par la mondialisation et un capitalisme financier prédateur, comme celles, en plein développement, qui résultent de l'approfondissement de la crise écologique. Au sein de nos sociétés comme au plan international, se pose par conséquent avec une acuité redoublée la question d'un partage plus équitable des richesses. C'est la condition pour que la "prospérité économique" ne rime pas seulement avec la réussite de quelques uns, mais retrouve son sens étymologique pour tous : la bonne fortune.
Marc Chevallier
Alternatives Economiques , Hors-série n° 097 - avril 2013
4 avril 2013
J'aimerais savoir si je suis corruptible
Je vois sans cesse autour de moi, des individus a priori honnêtes, qui, après s'être maintenus pendant des années dans la stricte légalité, succombent à l'attrait de l'argent. Qu'ils soient sportifs, politiques, entrepreneurs,...on leur a proposé des sommes importantes en échange de tâches indélicates ; ils ont toujours résisté, cramponnés à leur incorruptibilité, faisant naître sur le visage du tentateur un sourire de commisération. Certains se sont même forgés une notoriété de droiture. Et, un beau jour, allez savoir pourquoi, ils craquent.
Que leur arrive-t-il ? Pensent-ils, soudainement, qu'ils n'ont pas assez profité de la vie, se contentant jusque-là de recevoir régulièrement le salaire modeste de leur labeur quotidien ? Y pensent-ils peu à peu ? Dans ce cas, la révélation publique, seule, est brutale.
La vie est courte, le temps file, l'âge se fait pressant...Il ne faut plus attendre.
Personnellement je n'ai pas encore été soumis à pareil dilemme. On ne m'a pas offert sur un plateau d'argent une montagne d'or, pour services illicites. D'ailleurs, parfois, cela m'inquiète. Me fait-on trop confiance, ou...pas assez ?
Je souhaite vivement que la tentation se présente enfin. Qu'elle soit forte.
J'aimerais savoir si je suis corruptible.
Et le plus tôt serait le mieux.
Guy Chaty
Revue Décharge, 116, dec 2002
PS. L'actualité sur les paradis fiscaux montre que beaucoup d'individus ont succombé à la tentation !
14 mars 2013
Nos sociétés doivent muter
Le journaliste Hervé Kempf signe un livre grand public et sans concession :"Fin de l'Occident, naissance du monde". Entretien
.. Vous êtes très critique envers les classes dirigeantes.
HK : Aujourd'hui, un petit nombre d'individus décident pour tous. Et c'est cette oligarchie qui profite le plus au système actuel. Elle n'a donc aucun intérêt
à le changer...Si nos sociétés ne chosissent pas la sobriété, l'oligarchie gérera cette adaptation "à sa façon", et ce sera douloureux. Nous en avons l'exemple
en Europe avec les purges d'austérité, au détriment du plus grand nombre, alors que les hauts revenus sont protégés....
...Une société qui décide de s'adapter à la sobriété doit, entre autres, redonner une place centrale aux agriculteurs.
HK : Tout à fait. Pour la théorie capitaliste, la contrainte écologique n'existe pas : il est logique que dans ce schéma, l'agriculture soir de plus en plus
productive, et que les travailleurs agricoles fournissent de la main d'oeuvre pour l'industrie...Pour une agriculture économe en intrants, et qui utilise
tout le potentiel des ressources naturelles sans les épuiser, il faut plus de paysans qui travaillent la terre, et qui ont des savoir-faire reconnus...
Recueilli par François Ginisty
L'âge de faire, n°73 mars 2013
19 février 2013
LA NUIT LES CORPS SE VENGENT
La nuit, les corps se vengent.
Tout le jour, ils ont été menés, malmenés, contraints
serrés debout dans le métro
calés assis dans les autos
et les chaises de bureaux
calés debout devant les chaînes
et les machines à vous découdre
serrés assis dans le travail
et les usines et les chantiers
assourdis par les machines
éblouis par les soudures
happés, bousculés, secoués,
immobiles, trop mobiles,
sautés, tressautés, assommés,
décapités, castrés, décervelés,
désexés, désaxés, désemparés, rompus
La nuit, les corps se vengent.
Ils se retournent dans leur lit moite
dans les jambes, le sang ralentit et pèse,
dans des milliers de lits
les corps se retournent violemment
s'agrippant aux draps
cherchant fébrilement sous l'oreiller avec leurs doigts
avides de fraîcheur
le sommeil fuyant
un sommeil méchant
qui joue à cache-cache
qui fait semblant de se laisser trouver puis
puis glisse entre les yeux
rêve
rêve
marche à longs pas déliés
court à pleine foulées
à force de caresses, son corps gonfle de joie
puis éclate de rire
en orage clair
Nu sur un sol de verre
chaud et tendre
son corps léger flotte
vidé de mort
où sont les jours de rêve ?
Guy Chaty
Parcours, Editinter 2002
mardi 29 janvier 2013
Nos vies discount*
...Nos billets d'avion à prix canon, nos Caddie remplis au tarif discount, qui en paye la facture ? s'interroge le réalisateur en préambule...
Si le discount est une manne pour les géants du secteur - et une aubaine apparente pour les consommateurs -, son coût social est immense pour les salariés. Une mécanique infernale qui casse les prix, mais aussi les emplois et les salariés. Cercle vicieux que démonte pertinemment ce voyage au pays de la vie pas chère...
A l'heure où le modèle low cost semble bien loin d'être soldé - Air France vient de se lancer sur le créneau -, ce rappel, rageur, vaut de l'or.
* émission France 2, mardi 29 janvier, 22h55
Virginie Félix
Télérama, 26 janvier-1er février 2013
8 janvier 2013
LE PARASOL FOU
Le parasol frémit sous le vent.
Sur un souffle plus fort, il se soulève et part. Il court malhabilement sur son unique pied.
La plage a peur. Certains s'enfuient. D'autres s'accrochent à leur propre parasol.
Seuls les enfants ne bougent pas, affairés dans leurs châteaux de sable.
Le parasol lâché poursuit son chemin, moitié marchant, moitié volant. Puis tout à coup décolle, ivre de liberté.
Les plagistes sont soulagés. Ils deviennent curieux et regardent cet étrange oiseau qui monte dans le ciel puis change de direction. D'aucuns rient après la peur.
D'un coup le vent tombe ; le parasol avec, la pointe en bas, parachute fermé.
Et se plante dans un château de sable au milieu des enfants. La plage hurle.
Trop tard, le château est détruit et les enfants...
déçus.
Guy Chaty
Poésie sur Seine, décembre 2012
7 décembre 2012
Un danger pour la planète
Le nord du Canada héberge actuellement des gisements de sables bitumineux. Cette réserve de la taille de l'Arabie Saoudite est extrêmement dangereuse en raison de la toxicité du pétrole et de son impact sur l'environnement. Par deux fois déjà, la résistance populaire a permis de bloquer l'accès des oléoducs à ce poison, mais le défi qui nous attend aujourd'hui est encore plus grand.
Un nouvel accord commercial négocié en secret avec la Chine pourrait permettre aux entreprises chinoises d'avoir la mainmise sur les sables bitumineux et de poursuivre le gouvernement canadien s'il tentait d'entraver l'exploitation avec des lois environnementales ou sanitaires. Membre du parti conservateur, le Premier ministre canadien est favorable à l'utilisation du pétrole et est également célèbre pour son mépris à l'égard des questions climatiques. Il recourt à ce procédé pour contourner la démocratie alors que les conséquences pour la planète pourraient s'avérer désastreuses....
http://www.avaaz.org
9 novembre 2012
A CHEVAL SUR LA LUNE
Guy Chaty
A cheval sur la lune
illustré par Raphaël Lerays
Editions SOC & FOC 2012
16 octobre 2012
Alain Lipietz : entretien avec Weronika Zarachowicz (extraits)
W.Z. Avez-vous été surpris par les résultats du rapport Seralini sur l'effet des OGM ?
A. L. Non. Mais il ne faut pas s'enfermer dans les polémiques experts/contre-experts, tant les multinationales sont capables de faire asséner un démenti par un « expert » complaisant, comme on l'a vu sur le nucléaire, l'effet de serre ou l'amiante. Le vrai problème, c'est que les consommateurs ne veulent plus servir de cobayes et que les paysans ne veulent plus être asservis aux firmes agro-industrielles. Mais les gouvernements n'osent plus affronter celles-ci, tant elles sont puissantes, encore plus qu'Areva ! Pourtant cette agriculture productiviste est au coeur de la crise actuelle.
Pourquoi ?
Nos dirigeants, y compris chez les Verts, n'envisagent que la crise financière, et au mieux la crise « énergie-climat ». Ils refusent de voir la crise alimentaire. Il s'agit pourtant de l'autre grande crise écologique de ce début de siècle, qui résulte à la fois de l'artificialisation de l'agriculture (depuis les engrais jusqu'aux OGM) engagée dans les années 1950, et du libéralisme de la Banque Mondiale, qui a poussé tous les pays à se spécialiser dans les cultures d'exportation au détriment des cultures vivrières. D'où la famine au sud et la malbouffe au nord, celle-ci débouchant à son tour sur une gigantesque crise sanitaire (obésité, diabète, cancers.). En plus, elle renforce la crise énergétique : 50% des gaz à effet de serre sont produits par le système alimentaire, qui s'étend bien au delà de la seule agriculture !
Les crises énergétique et alimentaire seraient devenues interdépendantes ?
Elles se nourrissent l'une l'autre. La crise climatique née de l'effet de serre provoque des sécheresses et des incendies qui détruisent périodiquement les greniers à grains de la planète. Et les agro-carburants, réponse productiviste à la crise de l'énergie, rongent la surface disponible. En 2007-2008, l'incendie de l'Australie, joint à la hausse du pétrole, fut le détonateur de la crise mondiale. Puis, il y a deux ans, la Russie et l'Ukraine ont flambé. Cet été, l'Europe de l'Est et les États-Unis connaissent la pire sécheresse jamais enregistrée. C'est désormais une tendance lourde.
....
Comment expliquez-vous que l'actuel gouvernement manque de vision sur la transition écologique ?
Alors que l'Union européenne passe son temps à planifier, à fixer des horizons avec des dates et des quantités, et à rendre cette conversion envisageable, la France, elle, ne sait plus faire car elle a détruit des outils précieux comme le Commissariat Général du Plan. On emploie le terme « plan » par hostilité au libéralisme, mais on est incapable de lui donner un vrai contenu. On organise des "Grenelles", des grand-messes expresses comme la Conférence de l'Environnement. Mais un compromis ne peut se construire aussi vite ! Alors que les syndicats avaient fait un pas énorme vers l'écologie au cours du premier Grenelle, ils se sont cette fois crispés sur leurs positions anciennes.
....
Pourquoi est-ce possible au niveau européen ?
On y passe du temps à bâtir des convergences ! Les syndicats ont compris que la conversion verte rapportera plus d'emplois que le maintien de l'ancien système. Si vous remplacez une agriculture chimique par une agriculture bio, c'est 40% d'emplois en plus. Selon la CES, si vous développez les transports en commun pour diminuer de 30% la production de gaz à effet de serre d'ici 2020, vous détruisez 4,5 millions d'emplois dans l'industrie européenne de l'automobile individuelle, mais vous en créez 8 dans les transports en commun, depuis la construction des autobus ou tramways jusqu'à leur conduite, via l'aménagement de sites propres. Bref, vous réduisez la pollution, vous créez de l'emploi, des rentrées fiscales car vous relancez l'activité, et donc vous avez les moyens de rembourser ces grands chantiers de la conversion verte.
Sauf que les rentrées d'argent ne se font pas tout de suite !
Ce décalage constitue LE problème fondamental de la transition écologique : on investit aujourd'hui pour créer demain un modèle de développement sobre et économe. Donc on emprunte. Autrement dit le Traité budgétaire européen, le « traité de la règle d'or », qui nous interdit d'avoir un déficit est fondamentalement anti-écolo, et nous enlise dans la crise.
....
Vous êtes l'enfant d'une autre planification, la planification gaulliste, ultra-productiviste.
Bien sûr, les « planistes » de l'après-guerre sont mes maîtres, mes collègues, toute ma jeunesse. Nous avons été formés jusqu'en 1968 pour servir la grande technostructure française et ses champions industriels nationaux, grâce à la planification. Nous étions convaincus que pour assurer la prospérité et l'indépendance de la France, il fallait qu'elle soit championne dans le modèle productiviste. Aujourd'hui, on traîne ces vieux colosses, nés dans le giron de l'Etat - l'industrie nucléaire, pétrolière, l'agro-alimentaire artificialisé...- alors que le modèle a changé. On a tout faux ! Il faudrait une nouvelle planification, « un New Deal vert », pour créer et accompagner les « champions » d'une nouvelle façon de vivre et de produire. Mais les énormes bastions du modèle périmé résistent...
....la France s'entête dans des industries du siècle dernier. C'est la force des modèles : on n'arrive pas à lâcher la culture des années 60. Quand les vieux colosses EDF-Areva se diversifient -un peu .- vers l'éolien, ils le font sur le modèle du nucléaire : des fermes marines ultra-centralisées, reliées par des lignes très hautes-tensions aux consommateurs... C'est absurde, à tous égards. Si Pierre Mendès-France ou Pierre Massé revenaient parmi nous, ils seraient écolos. Mais le responsable actuel du Redressement Productif, Arnaud Montebourg, campe sur ces industries du passé, comme s'il ne voyait pas ce qui se développe partout dans le monde.
Et la France s'agrippe au nucléaire...
A l'inverse des pays limitrophes -l'Allemagne, la Suisse, l'Italie...- et du Japon ! Les pays les plus avancés savent que d'ici quelques années, il faudra abandonner cette industrie trop dangereuse. Le Japon, malgré ses vieux lobbies, annonce sa sortie du nucléaire d'ici 2030 ? La presse française boude cette révolution d'une des trois superpuissances nucléaires mondiales : moins d'un quart de page dans Libération, un article mi-figue mi-raisin dans le Figaro, et deux articles critiques dans le Monde et les Echos !
Et quand l'Allemagne annonce sa sortie et ferme une partie de son parc nucléaire, les Français ricanent : "Vous verrez cet hiver quand ils achèteront notre électricité nucléaire !" Eh bien, le jour du pic de la consommation française, le 8 février, nous avons acheté 9 millions de kwh sur les 10 produits par le solaire allemand ! Cette énergie avait coûté 240 euros le mwh aux électriciens allemands, ils les ont revendus 1700 euros à la France. Qui est responsable du déséquilibre de notre balance commerciale, de notre endettement ? Ceux qui ricanent quand l'Allemagne et le Japon sortent du nucléaire.
Comment accélérer notre changement de culture ?
Quand les citoyens résistent, se mobilisent et innovent, quand l'État fixe les perspectives, on obtient des accords, y compris des lobbies les plus arrogants, qui comprennent qu'ils doivent bouger. Angela Merkel a pu décider une sortie du nucléaire, sans que ce soit perçu comme une capitulation devant les écolos qui venaient de remporter le Bade-Wurtenberg, mais, au contraire, comme une grande offensive. Parce qu'un lobby industriel comme Siemens peut abandonner progressivement une de ses trois pattes, le nucléaire, pour renforcer les deux autres, l'éolien et le ferroviaire, dès lors qu'un nouvel horizon est fixé.
Si c'est si évident, pourquoi les Français ont-ils tant de mal à fixer ces fameux horizons ?
C'est un cocktail : perte de vue du collectif, perte de la culture des négociations collectives sur l'avenir, poids des lobbies d'État, même privatisés. Et parce qu'une partie de la population ne comprend toujours pas ce qu'est la crise écologique. Nous sommes encore sous la coupe du modèle profondément anti-écolo des années 60, et que Rudolph Bahro appelait "les intérêts compensateurs"... C'est moins une mutation politique que culturelle. Et donc personnelle. Aux écolos de faire rêver d'un modèle sobre, mais convivial et joyeux, et d'en jeter les bases dès maintenant, sur le terrain...
Télérama
3 octobre 2012
1er octobre 2012
PLUIE DE LUMIÈRES
Forêt d'automne
Les larmes coulent doucement
sur la joue brune des arbres
Bruissement dans le silence
Pleut-il ?
Moment du regard...Non
Tombent les feuilles et balbutient.
Chacune dans sa chute
est un miroir qui scintille
Pluie de lumières
Mes Navires
Editions de l'Atlantique 2010
7 septembre 2012
Appel à mobilisation contre le Pacte budgétaire !
La ratification du Pacte budgétaire par la France début octobre serait un évènement grave. Elle imposerait durablement une politique d'austérité. Nous, organisations associatives, syndicales et politiques, avons décidé de mener ensemble une vaste campagne d'éducation populaire et de mobilisation citoyenne, avec en particulier une grande manifestation unitaire le 30 septembre à Paris.
L'intervention des citoyens dans le débat démocratique doit convaincre les parlementaires, particulièrement celles et ceux qui ont été élus sur la promesse d'une renégociation de ce Pacte budgétaire, de refuser sa ratification et de permettre ainsi la réouverture du débat en Europe. L'appel (disponible en cliquant ici) en permanence à la signature de toutes les organisations qui souhaitent contribuer à ces objectifs.
Premiers signataires de l'appel :
Aitec-IPAM, AC !, ANECR, Attac, CADTM, Cedetim-IPAM, CDDSP, CNDF, Les Économistes Atterrés, Fondation Copernic, Front de Gauche (Fase, C&A, Gauche anticapitaliste, Gauche unitaire, PCF, PCOF, Parti de Gauche, République & Socialisme), Marches Européennes, NPA, Résistance Sociale, Solidaires, Sud BPCE.
Collectif pour un audit citoyen (http://www.audit-citoyen.org/)
6 septembre 2012
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17 juin 2012
En hommage à Daniel Sauvalle
LA CONCHE DES BALEINES
La vague court venant du Large de l'Océan houleux.
Surprise, elle bute du pied contre le sol caché
et le son de ce heurt gronde au creux de la conche.
Le haut de la vague
comme une main s'avance,
troublé d'écume blanche et d'espoir vacillant,
longtemps suspendue
s'effondre
en dominos le long de la plage.
La vague s'enroule sur elle-même dans un bruit de noix versées
puis chuinte en une voix qui glisse vers l'aiguë.
Alors l'Océan sur le sable pur
étale sa nappe blanche
aux dentelles éphémères.
Guy Chaty
Jointure, n°77, printemps 2004
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29 mai 2012
Agissements de compagnies pétrolières
Pollution de l'environnement, destruction des moyens traditionnels de subsistance, expulsions forcées...Des milliers de personnes sont victimes chaque jour dans le monde des agissements de groupes industriels multinationaux, notamment pétroliers et miniers. Face à la puissance de ces entreprises, à la corruption et au laxisme des gouvernements, les populations les plus pauvres n'ont aucun moyen d'obtenir justice et réparation.
Quatre ans après une pollution massive du delta du Niger, la compagnie pétrolière Shell n'a toujours pas nettoyé les dégâts causés ni dédommagé les populations qui continuent à souffrir...
La lettre d'Amnesty International, n°114, mai-juin 2012
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10 mai 2012
LE RAPPORT DU MOINE
Le moine a reçu l'ordre de la chef supérieure
De faire un long rapport sur l'état de ses nonnes.
Dans la cellule il entre et demande à sa soeur
de s'étendre sur la couche, tout voile sacré dehors.
La patiente sur le dos, il se penche sur le corps
Vérifiant tout point, même les plus délicats.
Consciencieux, attentif, il promène son oeil
lentement au-dessus des motifs et des seuils.
Pour lever certain doute, parfois il met le doigt.
La nonne concentrée s'abstient de s'émouvoir.
Une fois cependant elle ouvre un peu la bouche
et, en ânonnant, la nonne peu prolixe
murmure religieusement : « qui l'aurait cru si fixe ? »
Le moine, à peine perturbé dans son travail, tendu,
laisse échapper timide une réponse émue :
« prions ensemble : ah que ça dure.»
et s'active à nouveau à sa peine forcée.
La nonne dans un souffle prononce : « mon divin frère,
si je peux me permettre, vous me la coulez douce. »
Le moine dans la foulée déclame : « ma bonne soeur,
C'est pour mieux apprécier la chaleur du boudoir,
Que je reste chez vous jusqu'au début du soir.»
Guy Chaty
Poésie sur Seine, n°69-70, 2009
Anthologie de la poésie érotique française, du Moyen âge à nos jours, Giovanni Dotoli, Hermann, 2010
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29 avril 2012
Les économistes dans la campagne présidentielle
Dans Le Monde du 17 avril, une quarantaine d'économistes appellent à voter pour François Hollande...
Le candidat socialiste de 2012 fait plus le plein que la candidate de 2007 qui avait bénéficié d'un appel de 27 économistes à voter en sa faveur. Ce qui permet de voir que certains sont toujours fidèles aux postes de l'engagement politique assumé...
Du coup, l'entourage de Jean-Luc Mélenchon a voulu montré que l'expertise économique n'était pas l'apanage du candidat socialiste et Libération a publié le 20 avril la liste des soutiens à leur candidat...
Par contre, pas d'engagement d'économistes pour soutenir le président sortant. Les économistes qui se sentent en empathie avec lui craignent-ils de s'afficher ? Sont-ils plus proches des milieux d'affaires où l'engagement politique est plus mal venu que chez les universitaires et chercheurs qui constituent les soutiens des candidats de gauche ? ...
Christian Chavagneux
Alternatives économiques, lettre d'information du 26 avril 2012
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8 avril 2012
L'ARBRE
Anatole n'était jamais venu dans ce lieu. Il remarqua l'arbre qui le regardait et qui, lui aussi, avait l'air surpris de voir Anatole ici et à ce moment. Manifestement, il n'avait pas été prévenu du passage d'Anatole.
Tous ne pouvaient être avertis à temps. Même en s'y prenant suffisamment tôt !
Il est vrai qu'Anatole s'était décidé au dernier moment. Que faire pour éviter de telles surprises ?
Guy Chaty
Anatole et son chat, IHV 1998 et Editinter/Bilingue 2004 (traduction Werner Rossade)
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21 mars 2012
La vanité des sondages de bon matin
« ...L'auditrice de RTL parla net. Pourquoi, demanda-t-elle, les journalistes ne rappellent-ils jamais la marge d'erreur des sondages ?...
L'auditrice ne posait pas la question au hasard. Une proposition a été votée par le Sénat l'an dernier, rendant obligatoire la publication des marges
d'erreur (2 à 3%) avec chaque publication de sondage. Elle a même été votée à l'unanimité. Et puis, cette loi est partie à l'Assemblée où, le gouvernement ne l'ayant pas jugée "prioritaire", elle a disparu corps et biens. Si cette loi s'est ainsi perdue, c'est parce que les sondeurs n'en veulent à aucun prix...
Et voici donc Alain Duhamel qui chaque matin réchauffe sur RTL sa petite soupe aux sondages, héritant de la question de l'auditrice. Il se lance. "...On ne va pas dévaloriser chaque nouvelle qu'on donne."
Formidable aveu. Immense moment de radio, malheureusement passé inaperçu...
Ce n'est pas seulement la vie politique, qui est shootée aux sondages bidon. C'est un entrecroisement de carrières et d'intérêts que solidifie le ciment
sondagier. Mais pourquoi se plaindre ? Tout ceci est tellement moderne ! »
Daniel Schneidermann
Libération, Lundi 19 mars 2012
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3 mars 2012
FROU FROU
Cui cui cui ohé
Lap lap aaaah
Smac toutch yéhéé
Ramdam brouhaha
Murmure flou nippe
Frou frou tagada
Susurre ziiiii-ip
Ffff-fftt tabada
Smac smac pif pif
Boum tchac aïeaïeaïe
Charivari tif snif
Puf flop tacataïe
Poooc glou glou
Flon flon miam miam
Pschiii-it vvvou ou
Ad vitam eternam
Guy Chaty
poème-affiche de Wanda Mihuleac, collection livres-ardoises, Editions Transignum 2012
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10 février 2012
Cour des comptes : à chacun son métier
En préconisant une baisse des dépenses publiques dans son dernier rapport annuel, la Cour des comptes est sortie de son rôle. Et surtout, elle fait erreur
du point de vue macroéconomique, car ses préconisations auraient un effet récessif sur l'activité et empêcheraient de mettre en oeuvre les politiques sociales
dont la France a besoin...
Guillaume Duval
Alternatives économiques, 9 février 2012
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30 janvier 2012
DONNE TA MAIN
- Donne ta main.
L'enfant la tend
peinte en chocolat
qu'on l'essuie
puis la bouche les yeux ailleurs
les grands ont de ces
occupations il faut bien
les satisfaire si on veut
être libre pour le reste des choses
utiles
tremper les pieds dans
l'eau et la boue
remplir le seau de sable
et le vider
recommencer ramasser
un caillou minuscule
le prendre entre deux doigts
le sucer
faire d'une pelle une épée
menaçante démolir
les châteaux regarder
les insectes au pied des arbres
pourchasser les pigeons
toucher ce qui est sale
- lâche c'est sale
tuer les fourmis rouges parce que
les fourmis rouges....
ça pique et ça bouge
tu me rends ma main merci
j'ai encore du travail !
Guy Chaty
Site ecrits-vains Thema enfance
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14 janvier 2012
Répression
« On s'interrogera sans doute longtemps sur les origines de l'acharnement presque maniaque avec lequel un politicien aussi expérimenté que Nicolas Sarkozy s'est employé dix ans durant à multiplier frénétiquement des lois toujours nouvelles destinées à "renforcer" l'ordonnance du 2 février 1945 ...Il est vrai que sa qualité de maire de la commune la plus chic dans le département le plus riche de France ne le préparait pas directement à comprendre ni même à bien connaître la problématique de la jeunesse.
Cette politique répressive est fondée sur une évolution idéologique profonde : celle d'un ultralibéralisme qui s'oppose fondamentalement à l'idéologie issue de la Résistance, laquelle avait fondé notre justice des mineurs, entre autres grandes réformes ».
Pierre Joxe
Pas de quartier? Délinquance juvénile et justice des mineurs, Fayard, 300 pages, 19 euros, sortie le 11 janvier
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21 décembre 2011
PAUVRETHON
D'Amérique, nous vient une nouvelle révolutionnaire, une découverte bouleversante due à quelques savants américains. Après la mise en évidence d'un
gène du crime puis d'un gène de l'homosexualité, mieux d'un gène de l'infidélité, enfin d'un gène de l'intelligence, ils viennent de prouver l'existence
d'un gène de la pauvreté.
Déjà très riche, la carte du génome humain s'accroît d'un hôte de marque.
C'est une découverte capitale, il faut tout de suite en clamer les conséquences inouïes : le problème de la pauvreté dans le monde est en passe d'être résolu comme celui de la myopathie.
En effet, pour éliminer tous les pauvres du monde, il suffira de détecter, avant la naissance, ce gène responsable, de corriger si possible ses effets dès la première heure grâce à un traitement approprié, ou sinon de pratiquer un avortement thérapeutique.
Le traitement serait évidemment préférable, il éviterait les protestations habituelles des partisans de la protection inconditionnelle du fotus.
Par ailleurs, certains s'opposeront catégoriquement à ces mesures en affirmant que les pauvres doivent continuer à exister dans le monde, qu'ils y apportent quelque chose d'original, que sans eux le monde ne serait pas aussi riche,.il faudra passer outre l'avis de ces conservateurs.
Quoiqu'il en soit, il faut donc mettre en place une équipe de chercheurs - si possible française - pour savoir comment supprimer ce gène qui a déjà provoqué tant de misère. Il faut donner tous les moyens financiers possibles, sans rechigner, à cette équipe - jeune si possible - pour qu'elle puisse réaliser une des plus belles bonnes actions de tous les temps.
La télévision publique se doit de participer à cet effort en sollicitant, grâce à une de ces émissions dont elle a le secret et la pratique, la générosité de tous les téléspectateurs qui, soyons-en sûrs, auront à cour de communier dans cet immense élan.
Quel bel enthousiasme elle va faire lever, tel un vent nouveau et frais. Comme d'habitude, de nombreuses vedettes de la chanson, du cinéma et de la télévision seront heureux d'apporter leur concours - bénévolement, il faut le souligner - à cette oeuvre philanthropique.
Les pauvres, particulièrement concernés, seront évidemment invités à être des nôtres - dans la mesure de leurs moyens. A eux, ce n'est pas de l'argent qu'on leur demandera d'apporter, mais leur présence. Auparavant, on n'osait pas les montrer, ils dérangeaient : nous pouvions tomber dans leur état, être atteints de pauvreté, la pire des tares sociales. Maintenant, on sait que c'est une maladie non contagieuse, et qu'elle peut être soignée : on peut les regarder.
Quelques pauvres sur le plateau encourageront les téléspectateurs à envoyer des dons : la vision de la misère, les histoires de leur vie que les pauvres pourront nous conter, leurs difficultés à trouver un logement, à nourrir et élever leurs enfants, à leur donner une instruction satisfaisante, seront un déclencheur efficace de la générosité.
Pour ceux qui pourraient oublier leur promesse faite dans le feu de l'émotion, on pourra éditer des vidéos - retraçant la vie de quelques pauvres bien choisis - que les téléspectateurs pourront se repasser dans leurs moments d'égoïsme pour recharger leur émotivité. Le bénéfice de cette vente ira évidemment aux équipes de recherche.
Un nom pour l'émission vient tout naturellement à l'esprit, rappelant les prouesses déjà réalisées et annonçant le but recherché : le Pauvrethon. Et un slogan : "tous unis contre la pauvreté et son gène".
Guy Chaty
Contes cruels , Editinter 1998
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7 décembre 2011
Les marchés nous font bien marcher
...Après la Grèce (dette : 350 milliards d'euros), puis l'Italie (dette : 1900 milliards), les marchés s'attaquent aujourd'hui à la France
(dette : 1900 milliards). Déjà ici les autoroutes, l'électricité d'EDF, le gaz carbonique sont cotés en Bourse. Mais il reste des pans entiers de biens
et de services publics à "déverouiller" : la santé, l'éducation, les retraites, la culture, les routes nationales ! Les marchés n'ont pas fini de paniquer.
Les plans de rigueur n'ont pas fini de se succéder, les taux de grimper, Sarkozy, Merkel et compagnie de se féliciter de nous avoir sauvés. Tout en laissant
les marchés faire leur numéro.
Jean-Luc Porquet
Le Canard enchaîné, 16 novembre 2011
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17 novembre 2011
NUANCES
Si vous êtes
pauvres, vous pouvez
manifester spontanément dans
la rue, contre les
spéculateurs,
alors vous serez
expulsés par la police qui doit maintenir l'ordre
public et la
docilité.
Si vous êtes
riches, vous pouvez
spéculer tranquillement dans
votre bureau, contre les
peuples,
alors vous serez
protégés par la police qui doit maintenir l'ordre
privé et sa
richesse.
Si vous êtes
pauvre, un accident de
paiement et le
privé vous
expulse.
Si vous êtes
riche, un accident de
bourse, et le public vous
rembourse.
Si vous êtes
pauvre et malade, vous êtes classé
délinquant et pénalisé.
Si vous êtes
riche et fraudeur, vous placez vos
clinquants dans les paradis fiscaux.
Guy Chaty
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1er novembre 2011
Pac 2013 : vert pâle et toujours inéquitable
«...Seule note positive chez les écologistes, la Fédération nationale des agriculteurs biologiques (Fnab), se félicite du retour des soutiens à l'agriculture biologique
dans le "premier pilier de la Pac".
Le "premier pilier" rassemble des aides directes dont l'application ne dépend pas de la décision des Etats ou des
collectivités locales, contrairement aux mesures comprises dans le "second pilier". La Fnab espère ainsi voir la fin de "l'instabilité dans le dispositif
d'aide à la bio"
. Alors que la proposition doit désormais être examinée par le Parlement et le Conseil européens en vu d'une adoption avant 2013, les organisations du réseau
Pour une autre Pac se disent " bien décidées à porter le débat devant les Français. Il n'est pas acceptable de continuer à dépenser 40% de l'argent des
contribuables sur une politique responsable d'une forte perte d'emplois agricoles, d'une dégradation des écosystèmes et qui représente un danger alimentaire... »
Lisia Giachino
l'âge de faire, n°58, novembre 2011
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12 octobre 2011
LES MORTS DANS L'ESPACE
Depuis qu'on envoie les morts dans l'espace, la manière d'honorer les disparus a complètement changé. Sans doute parce qu'ils tournent sans cesse autour de nous :
leur présence est ainsi assurée sans qu'on ait à les visiter ; de plus, ils sont réellement là-haut comme on disait religieusement autrefois et il suffit de lever
la tête pour croire les apercevoir. Ils sont aussi en bas suivant les heures, mais ce n'est pas considéré comme une descente aux enfers : il suffit de patienter pour
qu'ils regrimpent au zénith.
La personnalisation est bien entretenue : à chacun est attribuée une fréquence qui permet d'entrer en contact avec lui. Il suffit de régler son récepteur et
le disparu émet un bip-bip particulier.
Malheureusement, des inégalités subsistent. Les riches s'offrent des modulations subtiles, certains mêmes des morceaux de musique, ou pis encore, l'émission d'un
signal lumineux, de sorte qu'ils peuvent réellement voir passer le regretté parent ou ami dans le ciel nocturne et dégagé.
L'inconvénient est que l'espace est de plus en plus encombré : après les restes de fusées, les satellites d'observation et les déchets nucléaires qu'on s'est
finalement décidé à mettre en orbite en attendant de trouver mieux pour leur destruction, les morts nouvellement arrivés et de plus en plus nombreux contribuent
fortement à l'embouteillage. Même en organisant des couloirs distincts qui forment comme des anneaux de Saturne, le risque est grand de provoquer des collisions
lors de nouveaux envois.
L'idée de certains est de carrément s'échapper de l'attraction terrestre et d'envoyer ce beau monde dans les lointains du cosmos. D'aucuns protestent : ce n'est
pas parce que notre espace est pollué qu'il faut polluer l'univers. Ou bien : alors là, pour le fait, nos disparus seraient vraiment disparus.
La raison l'emportera : enterrons à nouveau nos morts et le reste. Il y a encore de la place au fond.
Guy Chaty
Revue Décharge, n°151, septembre 2011
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21 septembre 2011
Que proposez vous pour éviter la catastrophe ?
Attac a envoyé aujourd'hui une liste de quatre questions aux candidats actuellement déclarés à l'élection présidentielle.
Au moment où des marchés financiers livrés à eux-mêmes menacent les fondements de la construction européenne et de nos sociétés, ces questions revêtent
une importance décisive pour nos concitoyens. Elles concernent la régulation financière, le financement des urgences sociales et écologiques, les banques
et la dette publique.
Presque tous les candidats à cette élection ont repris notre proposition de taxer les transactions financières pour réduire la spéculation et financer
les biens publics mondiaux. Cependant, cette mesure, face à laquelle les gouvernements européens tergiversent encore, ne suffira aucunement à conjurer
la catastrophe qui s'annonce. C'est pourquoi nous demandons à tous les candidats du champ démocratique quelles autres mesures fortes ils comptent proposer
pour faire face à cette crise. Nous leur avons demandé de bien vouloir nous répondre dès que possible, et en tout cas avant la réunion du G20 de Cannes début
novembre.
Nous publierons dès réception les réponses sur une page dédiée de notre site web, et la ferons circuler largement dans nos réseaux et dans la presse.
Attac France,
Paris, le 21 septembre 2011
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3 septembre 2011
MON OEIL
Curieuse histoire dans ma douche. Je me suis mis, involontairement, du savon dans l'oeil - banal - et me suis frotté avec force à l'endroit où le produit
détergent me piquait violemment. Oh surprise, j'ai senti alors mon oeil s'échapper de l'orbite. J'ai voulu le saisir mais il m'a glissé entre les doigts,
tant gluant il était, et est tombé à terre. Panique. Je n'en croyais pas mes yeux, enfin, mon oeil resté en place, le droit, celui qui est faible.
Je ne voyais pas le gauche. Je n'osais plus déplacer les pieds, craignant de l'écrabouiller. "Bon pied, bon oeil", me vint à l'esprit. J't'en fous.
Je tournais mon regard dans tous les coins du bac et aperçut.le trou d'écoulement, béant. Aïe ! S'en était-il aller dans les égouts ? Je le voyais, seul,
flotter dans les eaux "usées" et connaître un destin sordide. Quelle fin pour un oeil qui avait vu tant de belles choses. Quelle tristesse.
Un espoir : il était dissimulé derrière le savon, tombé lui aussi, l'arme du crime. Il était tourné vers moi. "L'oeil était dans" la douche "et regardait" câlin.
Il semblait me dire :
- "Pourquoi m'as-tu abandonné" ? Pourquoi m'as-tu laissé tomber ?
- Mais je ne t'ai pas laissé tomber, tu es parti tout seul sur une simple poussée.
- Ah tu l'avoues, tu m'as poussé.
- Par inadvertance, oui, je le reconnais. Je croyais vraiment que tu étais mieux attaché. Ce n'est pas la première fois que je me rince l'oeil !
Il éclata de rire, d'un rire grivois Ce qui me surprit de la part d'un oeil.
- Tu n'as pas l'air de mesurer le tragique de la situation, lui dis-je, pour le punir.
- Elle est surtout tragique pour toi qui devient borgne avec un oeil faiblard. Moi je vais me débrouiller pour me placer sur une autre orbite.
- Je ne sais pas si tu vas en trouver une dans les environs, rétorquai-je méchamment.
Puis je me trouvai idiot de me disputer avec mon oeil pour une simple séparation.
- Je t'offre mon orbite, tu la connais et roule dedans depuis longtemps. "Reviens veux-tu ton absence a brisé" ma vue.
- Je connais la chanson. La place n'est pas très sûre, j'en changerais volontiers.
A cours d'argument, je me baissai pour récupérer mon oeil de force. Mais c'était un regard fuyant, insaisissable. Je lui fis les yeux doux, ou plutôt l'oeil doux.
Il resta fixe et considéra mon oeil droit avec intérêt. Il semblait le découvrir : c'est vrai me dis-je, il ne l'avait jamais vu.
C'est ainsi que mon oeil gauche consentit à retrouver son orbite. Mais depuis ce jour, je louche. En effet, mon oeil gauche est tombé amoureux du droit et
ne cesse de le contempler. Ce dernier, faible et timide, supporte mal la
situation : il en est tout rouge.
Me voilà affublé d'un regard étrange, d'autant plus que par peur de le perdre de nouveau je ferme à demi la paupière sur mon oeil gauche.
Quand je rencontre mes amis, ils me disent : depuis quelques temps, tu as une drôle de touche. Mais j'entends chaque fois confusément : drôle de "louche"
ou drôle de "douche". Cette histoire m'a beaucoup marqué. Pour un simple savon. A partir de ce jour, j'ai décidé de m'en passer. J'ai pas l'air clair,
mais j'ai mes deux yeux.
»
Guy Chaty
Phonèmes en folie, Interventions à haute voix, 2008
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14 août 2011
D'un retournement l'autre
« Le rideau s'ouvre : Messieurs les Banquiers, son Altesse le président de la République française, Monsieur le Premier ministre, Monsieur le Gouverneur de la Banque
centrale et le petit peuple des conseillers de la Cour. La pièce peut commencer : lessivés par la crise des désormais célèbres « subpraïmes » (sic), les Banquiers
s'apprêtent à sonner à la porte de l'État pour lui demander de mettre la main au porte-monnaie. avant que le résultat de leurs acrobaties ne fasse exploser les dettes
publiques et conduise à la rigueur pour tous ? pour tous les autres qu'eux.
C'est une forme particulière, et inattendue, celle de l'alexandrin, qui est ici convoquée pour mettre en scène la crise de la finance mondiale. Peut-être en effet
fallait-il l'ambivalence d'un vers qui convient à la tragédie aussi qu'à la comédie pour saisir et la déconfiture d'un système aux abois et l'acharnement bouffon
de ses représentants à le maintenir envers et contre tout.
Mais ce que ces « élites » aveuglées par leur domination, et déjà disqualifiées par l'Histoire, ne voient plus c'est qu'un retournement peut en cacher un autre.
Et celui des marchés annoncer celui du peuple.»
Frédéric Lordon
D'un retournement l'autre, Seuil 2011
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28 juillet 2011
COQUELICOT
Tes calicots
Câline
ont la couleur du lit
qu'a lutiné Colas.
Tes yeux à la coque
Line
caracolent sur mon cou
là
Ton colimaçon colle
mon licou si lisse
qu'il a le
choléra
Ta colère
Câline
du lit découd
les draps
Mais le colis du coq
est cousu de lilas
CO-QUE-LI-COT !
Guy Chaty
Des mots pour le rire, Editinter, 2000 puis 2009
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29 juin 2011
Goldman Sachs prend officiellement la tête de la BCE
Mario Draghi, ancien Président de Goldman Sachs Europe, prend aujourd'hui la présidence de la Banque centrale européenne. Il présidait la banque d'affaires
américaine au moment où celle-ci, dans les années 2000, aidait la Grèce à maquiller ses comptes publics. Son rôle va être de préserver les intérêts des banques
dans l'actuelle crise européenne.
On pouvait jusqu'ici s'interroger sur les raisons qui poussaient la BCE et Jean-Claude Trichet à s'opposer de façon virulente - y compris face à la chancelière
allemande - à toute idée d'une quelconque restructuration de la dette grecque.
Cette attitude semblait incompréhensible puisque tous les analystes, y compris les économistes des banques, s'accordent à considérer que la Grèce ne pourra
pas assurer le service de sa dette dans les actuelles conditions contractuelles. Un rééchelonnement, voire une annulation partielle semblent de l'avis général
inévitable. Vouloir retarder l'échéance ne fait qu'aggraver les dégâts économiques et sociaux provoqués par les plans d'austérité brutaux et impopulaires imposés
aux Grecs.
Le nomination de M. Draghi clarifie donc les choses. La BCE défend non pas l'intérêt des citoyens et contribuables européens, mais l'intérêt des banques.
Une étude britannique citée hier par Les Echos a le mérite de quantifier clairement le processus en cours. Cette étude indique que grâce aux « plans de sauvetage »
de la Grèce et au « mécanisme européen de stabilité » mis en place par la BCE, le FMI et l'Union, « la part de dette hellénique aux mains des contribuables étrangers
passera de 26 % à 64 % en 2014. Cela veut dire que l'exposition de chaque foyer de la zone euro va passer de 535 euros aujourd'hui à 1.450 euros ».
Le « sauvetage » de la Grèce est donc en fait une gigantesque opération de socialisation des pertes du système bancaire. Il s'agit de transférer l'essentiel
de la dette grecque - mais aussi espagnole et irlandaise - des mains des banquiers vers celles des contribuables. Il sera ensuite possible de faire assumer les
frais de l'inévitable restructuration de ces dettes par les budgets publics européens.
Comme le disent les Indignés espagnols, « ce n'est pas une crise, c'est une escroquerie ! ». Le Parlement européen a voté hier le « paquet gouvernance » qui
réforme le pacte de stabilité en renforçant les contraintes sur les budgets nationaux et les sanctions contre les pays en infraction. Le Conseil européen réuni
aujourd'hui et demain va parachever le travail. Et ce n'est pas la prochaine nomination de Christine Lagarde à la tête du FMI qui réduira l'emprise des banques
sur les institutions financières internationales, bien au contraire.
Heureusement les résistances sociales et citoyennes vont croissant dans toute l'Europe. Gouverner pour les peuples ou pour la finance ? La réponse est aujourd'hui
claire: il va falloir que les peuples européens reprennent la main, pour construire ensemble une autre Europe. Les Attac de toute l'Europe organisent du 9 au 13 août
une Université européenne des mouvements sociaux à Fribourg, en Allemagne. Ce sera cet été l'un des lieux majeurs de coordination des résistances et de constructions
des alternatives européennes.
ATTAC France
Paris le 24 juin 2011
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11juin 2011
LE VIDE
Il se fit un grand vide. On ne pouvait plus compter sur rien.
Les Marsipiens qui jusqu'ici avaient réussi à s'organiser tant bien que mal étaient absents de leur sphère et flottaient péniblement dans leur paresse.
Ceux qui auraient pu reprendre les rênes s'empêtraient grossièrement dans leurs disputes et survolaient ailleurs des horizons fumeux.
Alors un Marsipien minuscule, profitant de l'aubaine, se gonfla considérablement pour occuper le terrain. Il réussit à convaincre quelques excités
et la majorité des endormis de souffler sur sa vanité.
Le souffle était petit mais grand était le nombre des souffleurs. Le Marsipien minuscule enfla
tant qu'il occupa le vide central repoussant à la périphérie tous les Marsipiens, les pressant les uns contre les autres de sorte qu'ils ne pouvaient plus
faire un mouvement, ni produire une quelconque pensée. La surprise fut générale.
L'affaire se répandit dans le monde. Partout on plaignit les Marsipiens de n'être plus qu'une boursouflure géante constituée d'un Marsipien unique maintenant
à distance l'immense majorité des autres, agglutinés à la surface du vide.
Dans leur piteux état d'écrasés, quelques Marsipiens un peu plus évolués que la moyenne essayaient d'inventer une épingle suffisamment acérée pour faire éclater
la bulle insolente et redonner à tous un espace digne de leur passé.
Guy Chaty
Comme en poésie, n°46, juin 2011
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30 mai 2011
La chute du mur néolibéral
« Tina : "There Is No Alternative". L'expression symbolise la vulgate économique à l'origine de la grande crise, explique avec férocité,
le livre de Gérard Mordillat et Bertrand Rothé "Il n'y a pas d'alternative" (Seuil, 180p.,19 euros)....
Depuis 1989, il n'existe plus de frein à la fusée néolibérale qui impose ses règles - ou son absence de règles - sur tous les continents....
Les pays développés en ressortent exsangues. D'un côté, il faut soutenir les banques et aider les salariés en faillite, comme aux Etats-Unis,
de l'autre, les politiques ficales ont appauvri les Etats. Par un incroyable tour de bonneteau, la crise de la dette privée se métamorphose en crise
de la dette publique. Un comble : la crise profite aux mêmes spéculateurs !...C'est ainsi que Goldman Sachs, écrivent Mordillat et Rothé, "a doublement
contribué aux problèmes de l'euro : en aidant un des pays membres à tricher, puis en utilisant cette tricherie pour spéculer contre lui". Cerise pourrie
sur ce pudding avarié, c'est un ancien de Goldman Sachs, Mario Draghi, qui risque, en juin prochain, de prendre les rênes de la Banque cenntrale européenne.
Un bon sujet d'économie pour le bac 2011 ? »
Philippe Cohen
Marianne,n°734 du 14 au 20 mai 2011
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15 mai 2011
L'ÉVÊQUE ET LA VOITURE
En ce temps-là, l' Eglise avait décidé de réduire ses dépenses de luxe, et les dignitaires tiraient le diable par la queue. Mon père l'évêque
se rendait à Rome à bord d'une vieille voiture rouge prête à passer l'âme à gauche. Soudain, l'évêque entendit un bruit à l'arrière droit et
la voiture s'arrêta au milieu de la route. L'évêque descendit, sa clef amulette à la main pour chasser le diable et, se tournant vers l'essieu,
il devisa...avec Dieu.
Celui-ci dit à mon père :
« C'est ton destin, mon fils, la roue tourne.
- On ne le dirait pas, répliqua l'évêque.
- Tu plaisantes, lui dit Dieu, mais je t'aurai au tournant.
- Si j'y arrive, rétorqua mon père qui ne manquait pas d'esprit...sain.
- As-tu fait le plein au moins, demanda Dieu.
- Oui, répondit l'évêque avec...aisance.
- Et l'huile ? insinua Dieu.
...Il en manquait beaucoup. L'évêque alla chercher son gros bidon d'huile et l'ouvrit : l'oil était dans la bombe et regardait, malin.
L'évêque bénit le beau gros bidon blanc en se frappant le sien et versa l'huile sacrée dans ce sacré moteur. Puis, respectant le canon de l'Eglise,
il aspergea les batteries avec son goupillon automatique et espagnol et envoya son opus vers le ciel. Enfin, il alluma les bougies et la voiture démarra.
Cent mètres plus loin, elle s'arrêta de nouveau. L'évêque était découragé : il retira sa calotte et s'assit sur le pot d'échappement. Mais l'espoir
lui revint quand il vit arriver sur la route une bonne soeur à bicyclette. Malgré son grand âge, elle pédalait avec ardeur...et passa sans s'arrêter.
« Eh ma soeur, criait mon père.
- Et ta soeur, répondit l'écho. »
Moralité, dit l'évêque, qui en avait, il ne faut pas se fier aux appâts...rances.
Guy Chaty
Des mots pour le rire, Editinter, 2000 puis 2009
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28 avril 2011
Encore une arnaque lontemps cachée
« LA RUÉE VERS L'OR VERT
En Afrique, en Asie...les terres arables attirent les investisseurs. Un désastre au niveau local.
C'est le "Financial Times" qui le premier souleva un coin du voile. En novembre 2008, le quotidien britannique révèle
que le conglomérat sud-coréen Daewoo vient d'acquérir à Madagascar la jouissance, pour quatre-vingt-dix-neuf ans, de...la moitié des terres arables
de l'île !...Partout dans le monde, des journalistes et des associations enquêtent et découvrent que l'"affaire Daewoo" n'a
rien d'un cas isolé....
La Chine, l'Inde, la Lybie, les pays du Golfe achètent des terres en Afrique, en Amérique du Sud, en Asie, en Europe de l'Est....
Et c'est ainsi que pour les petits paysans d'Ethiopie et d'ailleurs, le développement de l'agriculture est en passe de signer leur arrêt de mort.
Marc Belpois
Télérama, 13 avril 2011
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10 avril 2011
LES CEUX-LA
« Il y a les ceux-là, les ceux-ci et les autres.
Les ceux-là aident les ceux-ci à exploiter les autres pour que les ceux-ci restent les ceux-ci.
Les ceux-ci donnent des miettes aux ceux-là pour les remercier.
D'un certain point de vue, il vaut mieux être ceux-ci que ceux-là et ceux-là plutôt qu'autres.
Jusqu'au jour où les autres en auront vraiment assez des ceux-ci et par conséquent des ceux-là.
Pourquoi les ceux-là ne s'entendraient-ils pas avec les autres afin que les ceux-là et les ceux-ci ne se distinguent plus des autres ? »
Guy Chaty
Des mots pour le rire, Editinter 2009
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29 mars 2011
Mais ça continue...
« Des agriculteurs victimes de pesticides veulent romprent le silence.
Ils ne sont âgés que de 40, 47, 50 ans et sont atteints de la maladie de Parkinson, d'un lymphome,
d'un cancer de la prostate, de la vessie...
Aujourd'hui, ils ont décidé de briser l'omerta. Et lancent, samedi 19 mars à Ruffec (Charente),
une association Phyro-victimes. Pour susciter une prise de conscience des pouvoirs publics et offrir une
aide aux autres malades qui, comme eux, sont atteints mais n'osent parler de ce qui leur arrive...
"Il est difficile d'admettre que le système auquel vous avez cru est en train de vous empoisonner",
explique Paul François, qui sait le sujet tabou dans la profession...Et pourtant, depuis qu'il
a lancé avec quelques autres un premier SOS il y a un an, les appels à l'aide se multiplient. "On va
en crever. Et il ne faudrait rien dire ?", lâche-t-il, persuadé comme Jacky Ferrand, comme Jean-Yves,
qu'on est face à "une bombe à retardement". »
Laetitia Van Eeckhout
Le Monde, 20-21 mars 2011
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14 mars 2011
Suggestions à Dieu pour réparer les défauts de l'homme créé
à son image
Extrait
Nous allons ici, respectueusement, et en toute modestie humaine, faire quelques suggestions à Dieu
pour l'encourager à réparer les principaux défauts de l'homme créé à son image...
Je comprends qu'il n'y ait pas eu de révision générale au cours des temps parce que, grosso modo,
tout a tenu le coup. Cela ne justifie pas le laisser-aller pour un dieu qui aurait dû être prévoyant
et perfectionniste, et avoir le souci de défendre son image.
Mais il y a beaucoup plus grave, concernant le cerveau, cet organe supérieur.
Il manque dans celui-ci une sorte d'intestin dont la fonction serait de traiter les productions du
cerveau et de rejeter les déchets : idées morbides, sentiments de haine, pulsions racistes, attraits
pour les dictateurs, etc.
Un trou discret, situé par exemple derrière la tête à la base du crâne, dissimulé par les cheveux
- même pour ceux qui n'ont plus qu'une couronne - permettrait d'évacuer cette merde cérébrale au lieu
de la laisser se mélanger au reste de la production, et d'empoisonner les pensées sereines et élevées.
Une fois par jour, en moyenne, l'homme éprouverait une envie de déféquer par la tête, se retirerait
dans un endroit adéquat, ferait, et essuierait, les excréments ainsi produits.
Ceux-ci ne seraient pas nécessairement en grande quantité : le poison tient souvent peu de place. Ce
pourrait être simplement un écoulement de liquide, puant cela va de soi.
Il y aurait des cas de constipation : la victime serait alors dangereuse pour elle-même et les autres,
elle augmenterait les effectifs des belliqueux de tout poil, sportifs hargneux, chasseurs acharnés,
guerriers rentrés et parfois sortis, fascistes en commandos, policiers en bavures,...
Moins pernicieux seraient les phénomènes de diarrhée : le malade éprouverait même un soulagement
immédiat à évacuer rapidement ces pensées nauséabondes.
Tous étant soumis à ces productions intimes, inséparables de la condition humaine, il n'y aurait pas
de honte à se laisser aller à quelques pets malodorants, signe de reconnaissance de cette condition,
assumée avec entrain, et signe même de cette santé mentale, fragile équilibre entre le prétendu normal
et le pathologique, si difficile à conserver.
Nous arrivons maintenant justement à l'examen de cette condition humaine, faiblesse essentielle et
peut-être irréparable, que certains ont appelée : La Maladie Humaine...
Guy Chaty
Contes cruels , Editinter 1998
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7 mars 2011
Une onde de choc sur le moyen orient
« La chute du pouvoir de Ben Ali en Tunisie et celle de Moubarak en Egypte font trembler les régimes
les plus verrouillés de la région, mais changent aussi la donne dans les dossiers iranien et
israélo-palestinien.
Si personne ne peut prédire quel régime va s'imposer à moyen terme en Egypte (continuité de la
prééminence des forces armées, prise de contrôle du pouvoir par les forces islamiques, installation
progressive d'un système pluripartite et sécularisé), les révoltes égyptienne et tunisienne ont d'ores
et déjà porté un coup fatal à ce qui était considéré comme une donnée inébranlable du monde
arabo-musulman : la pérennité d'un modèle de gouvernance fondé sur la toute-puissance d'un homme issu
de l'armée ou de la police, se maintenant en place grâce à la répression, à la prise en main de tous
les moyens de communication et au truquage des élections, pratiquant le clientélisme, le népotisme et
la corruption à grande échelle et cherchant en fin de parcours à instaurer une pratique dynastique... »
Jacques Almaric
Alternatives internationales, n°050 mars 2011
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14 février 2011
TON MOBILE EST-IL TACHE DE SANG ?
Toi qui marche tranquille l'appareil à l'oreille pour des choses futiles comiques ou même sérieuses
Sais-tu ce que contient cet objet fantastique ?
Des composants bien sûr...mais que cache ce mot au son technocratique ? Peu t'en importe quand de ton
mobile coule la voix tant attendue.
Pourtant il se pourrait que sur tes doigts coule aussi le sang de ceux qui creusent loin de toi la
terre du minerai précieux source des composants.
Des millions de morts au Congo dans des guerres des massacres des viols financés par l'argent du
minerai si cher.
Toi Nokia et autre compagnie tu sais mais qu'as-tu fait depuis l'an 2000 - point de départ de la
déclaration par les entreprises industrielles des principes éthiques - pour révéler la chaîne
des approvisionnements ? Changer de fournisseurs ? Rien car paraît-il la transparence n'est pas
propice au profit ni à la concurrence...
Guy Chaty
A partir de l'article Blond in the mobile, Olivier Herviaux
Arte 22.40, Le Monde-Télévisions p.13,
mercredi 9 janvier 2011
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28 janvier 2011
Merci !
« Ils n'ont toujours pas trouvé les mots...Après tout, la France est le pays de la Révolution
et des droits de l'homme...
Oui, on comprend qu'ils n'aient pas encore trouvé les mots. Exporter des armes made in
France
et le savoir-faire de nos flics tricolores, ils savent. Trouver les mots justes, non.
Il en existe un, pourtant, très simple et très bref : merci. Amis Tunisiens, grâce à vous, nous
nous nous remettons à rêver. Car, reconnaisssons-le, chez nous non plus ça ne rigole pas tous
les jours : déprime générale, jeunesse sans avenir, chômage massif, oligarchie qui s'en met plein
les poches, Président battant tous les records d'impopularité et "sécuritocratie" en marche, ça
doit vous rappeler quelque chose...
Amis tunisiens, encore merci !»
Jean-Luc Porquet
Le Canard enchaîné, mercredi 26 janvier 2011
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10 janvier 2011
SOUILLURES
Le soleil
rouge de honte pour
la terre tout le jour
de colère impuissant
se cache la nuit puis
reparaît le matin
lavé des souillures
blanc lumineux prêt
à replonger
dans l'immonde
Guy Chaty
Noir, Mes navires, Éditions de l'Atlantique 2010
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5 décembre 2010
INDIGNEZ VOUS !
...« Le motif de la résistance, c'est l'indignation.
On ose nous dire que l'Etat ne peut plus assurer les coûts de ces mesures citoyennes. Mais comment peut-il manquer aujourd'hui d'argent pour maintenir
ces conquêtes [celles de la résistance]
alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la libération, période où l'Europe était ruinée . Sinon parce que le pouvoir de l'argent
tellement combattu par la Résistance, n'a jamais été aussi grand, insolent, égoïste, avec ses propres serviteurs jusque dans les plus hautes sphères de l'Etat.
Les banques désormais privatisées se montrent d'abord soucieuses de leurs dividendes, et des très hauts salaires de leurs dirigeants, pas de l'intérêt général.
L'écart entre les plus pauvres et les plus riches n'a jamais été aussi important ; et la course à l'argent, la compétition, autant encouragée....
Deux visions de l'histoire
...L'histoire des sociétés progresse, et au bout, l'homme ayant atteint sa liberté complète, nous avons l'Etat démocratique dans sa forme idéale.
Il existe bien sûr une autre conception de l'histoire. Les progrès faits par la liberté, la compétition, la course au "toujours plus", cela peut être vécu
comme un ouragan destructeur...
L'indifférence : la pire des attitudes
...Aux jeunes, je dis : regardez autour de vous, vous y trouverez les thèmes qui justifient votre indignation - le traitement faits aux immigrés,
aux sans-papiers, aux Roms. Vous trouverez des situations concrètes qui vous amènent à donner cours à une action citoyenne forte. Cherchez et vous trouverez !
Mon indignation à propos de la Palestine
...IL faut absolument lire le rapport Richard Golstone de septembre 2009 sur Gaza, dans lequel ce juge sud-africain, juif, qui se dit même sioniste, accuse
l'armée israélienne d'avoir commis des "actes assimilables à des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, à des crimes contre l'humanité"
pendant son opération "Plomb durci" qui a duré trois semaines...
...Je pense bien évidemment que le terrorisme est inacceptable, mais il faut reconnaître que lorsque l'on est occupé avec des moyens militaires infiniment
supérieurs aux vôtres, la réaction populaire ne peut pas être que
non-violente...
La non-violence, le chemin que nous devons apprendre à suivre
...Le message d'un Mandela, d'un Martin Luther King trouve toute sa pertinence dans un monde qui a dépassé la confrontation des idéologies et
le totalitarisme conquérant...»
Pour une insurrection pacifique
...Mais cette menace [celle de la barbarie fasciste]
... n'a pas totalement disparu. Aussi appelons-nous toujours à "une véritable insurrection pacifique
contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles
et de la culture, l'amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous."
A ceux et celles qui feront le XXIème siècle, nous disons avec notre affection :
CREER, C'EST RESISTER.
RESISTER, C'EST CREER.»
Stéphane HESSEL
extraits de INDIGNEZ VOUS !,Indigène éditions, octobre 2010
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20 novembre 2010
LA LOI
Il entra dans la salle et regarda dans la direction qu'on lui avait indiquée. Il aperçut les hommes et les femmes au fond, éclairés livides
par une ampoule d'un jaune minimum. De sa naissance il venait, et s'assit à la place laissée libre par un vivant qui partait désabusé vers
le trou noir d'une porte manquante. Il distingua alors les policiers debout qui surveillaient les hommes et les femmes assis. On lui donna
les dés. Quelques milliers d' yeux autour de la table le regardèrent : c'était assurément un moment intéressant puisqu'il ne disposerait des
dés qu'une fois dans sa vie, comme les autres. Il se jeta dans le hasard : les dès fournirent un nombre et à cet instant même un bras s'allongea
vers lui, au bout du bras pendait un sac que le nouveau venu prit et garda.
Chacun avait un sac et devait s'en contenter même si ce sac était plus léger que celui du voisin, car c'était le sac qu'il avait tiré. Il n'avait
pas eu de chance, c'est tout. Un sac pour chacun, chacun avec son sac.
Parfois, un vivant essayait de prendre le sac du voisin plus gros que le sien. Ceux qui avaient tiré un sac lourd se cramponnaient sur leur sac
les bras en arceaux : les autres les regardaient, affamés. Les policiers étaient là pour protéger les lourds : étant moins nombreux, ceux-ci étaient
plus exposés aux agressions.
Si un léger se laissait aller à attaquer un lourd, les policiers intervenaient à plusieurs (il y avait suffisamment de policiers), battaient le délinquant,
puis le punissaient en lui allégeant encore davantage son sac.
Si plusieurs légers se battaient entre eux pour des différences ridicules, les policiers s'en mêlaient mollement et vidaient un peu plus les sacs des
belligérants.
Jusqu'au jour où tous les légers se groupèrent pour attaquer les lourds : j'étais sorti depuis bien longtemps par la porte manquante.
Guy Chaty
La vie en raccourcis, Éditions Clapàs 2002
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2 novembre 2010
Les lobbies entendus
« ...le ministère de l'Agriculture adoptait, début 2008, le plan Ecophyto 2018. Objectif : réduire de 5°% l'usage des pesticides d'ici 2018. Un changement
complet alors que la France se classe depuis longtemps parmi les plus gros utilisateurs de produits phytosanitaires. En 2009, le gouvernement continuait
sur cette lancée en prévoyant d'interdire la publicité pour les pesticides grand public...Mais c'était sans compter sur l'influence des lobbies...Résultat,
la publicité pour les pesticides grand public demeure autorisée, et interdire un produit phytosanitaire à la vente...pourrait devenir impossible. Jusqu'à
présent, le retrait d'un pesticide se basait sur l'évaluation des impacts sanitaires et environnementaux. Dorénavant, les risques pour la santé et
l'environnement ne suffiront plus, il faudra compter avec "l'évaluation des effets socio-économiques" d'un retrait. C'est un recul phénoménal pour la
protection des consommateurs.»
Que Choisir, n°486, novembre 2010
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14 octobre 2010
LA MACROÉCONOMIE À L'ÉCOLE
- Mon papa y dit que si on est pauvre c'est la faute des capitalistes...
- Je vais t'expliquer, mon petit Nicolas, ainsi qu'à tous tes camarades. Globalement, c'est-à-dire prise dans son ensemble, la planète ou plutôt les gens
qui y vivent, est de plus en plus riche. On appelle cela « la croissance ».
Malheureusement, il y a des gens qui profitent de la situation et qui s'enrichissent beaucoup plus vite que les autres. Il faut changer cela.
- Alors, Madame, ils vont nous donner ce qu'ils ont en trop ? C'est mon papa qui va être content, et ma maman aussi, parce que le 25 de chaque mois
on a plus de sous. Pourtant on se prive tout le mois, c'est maman qui le dit...
- Ce n'est pas aussi simple, ma petite Clara. Il faut être patient. Qu'il y ait des personnes plus riches que d'autres, c'est normal....
- Ah bon ?
- Oui, les très riches sont des entrepreneurs énergiques qui donnent du travail aux autres...
- Mon papa, il est au chômage...
- Je sais, mon petit Bernard, il y a encore trop de chômeurs, mais on s'en occupe. Il faut être patient.
- Mon cousin, il est communiste. Il m'a dit que les riches y font que devenir plus riches, c'est leur seul but. Ils donnent pas du travail aux autres.
- Mon petit François, ces gens-là existent en effet et ils ne se conduisent pas bien. On va les empêcher d'agir ainsi.
- Quand Madame ?
- C'est long à mettre en place mais ça se fera. L'idée qu'il faut que vous reteniez, c'est que globalement la situation est bonne même si chez vous,
dans votre famille, elle est mauvaise.
- Alors mon papa il a bien raison !
- Mon petit Nicolas. Le capitalisme est une belle invention de l'homme. Il a quelques défauts mais nous sommes nombreux à vouloir corriger ces défauts.
- Et si c'est pas possible ?
- Il faut être optimiste.
- Madame, et si les hommes inventaient autre chose ?
- Cela ne figure pas au programme de cette année.
Guy Chaty
Comme en poésie, n°43, septembre 2010
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5 octobre 2010
Nouvelles de la rentrée
Mauvaise
<< Suppression de 16 000 postes d'enseignants, classes plus chargées, classes maternelles amputées, suppression progressive des réseaux d'aide spécialisée
aux élèves en difficulté (Rased), accélération des logiques de ghettos avec la fin de la carte scolaire, suppression des instituts universitaires de formation
des maîtres (IUFM), loi Carle sur le financement de l'enseignement privé par les municipalités...>>
Bonne
<<
Le parlement européen vient d'adopter, à une très large majorité, le rapport de José Bové, vice-président de la Commission de l'Agriculture et
du développement Rural, " des revenus plus justes pour les agriculteurs dans le cadre d'un meilleur fonctionnement de la chaîne alimentaire"... >>
l'âge de faire, octobre 2010
Instructive
<<
...voici une statistique édifiante citée par "Les Echos" (23/9) : " Les fonds de pension des cent premières entreprises américaines
accusent un déficit de 460 milliards de dollars." Précision, ces "fonds" possèdent des capitaux qui ne couvrent que 70% des pensions qu'ils se sont
engagés à verser...>>
Le Canard enchaîné, 29 septembre 2010
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22 septembre 2010
TONSURES
J'en avais assez de tondre ma pelouse, une fois par semaine au printemps !
J'ai acheté un mouton : il tond à ma place et se paie lui-même avec l'herbe dont il me débarrasse.
Évidemment, je dois tondre mon mouton : une fois par an, c'est moins fréquent.
Mais c'est encore contraignant. Aussi j'ai loué les services d'un berger : il tond vite et bien, et je le paie très peu, j'ai même parfois
l'impression de le tondre...
Le grand bélier qui nous surveille pour me punir m'a fait entrer dans un couvent : là je suis moine et jardinier.
Sur le crâne, on m'a tondu ; et chaque semaine, au printemps, je tonds la pelouse du cloître.
Le matin, tous en choeur, à l 'église nous chantons :
Le grand bélier viendra
tontaine et ton ton.
le grand bélier viendra
nous sauver de la tonte
le grand bélier viendra
nous sauver de la honte
Guy Chaty
Des mots pour le rire, Editinter, nouvelle édition 2009
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14 septembre 2010
La jeunesse est l'avenir de l'homme
« Le consumérisme ...est devenu toxique...Dans une société où l'acte d'achat est le plus important, où l'argent est érigé en valeur absolue, cela veut
simplement dire qu'il n'y a plus de parents, plus d'adultes, plus d'autorité et donc plus d'enfants non plus...
Dans cette vaste entreprise de détournement de l'attention des enfants vers les marchandises, les parents sont expulsés, décrédibilisés - « ringardisés »,
comme on disait il y a quelques années - mais aussi mis en position d'accusés. Quant aux enfants, ils sont abandonnés à une condition orpheline provoquée
par cette incurie.
En détruisant l'autorité des parents sur les enfants, on détruit du même coup le pouvoir symbolique de la Loi (c'est à dire de ce qui stabilise sous la forme
d'un contrat social une compréhension historique et partagée de l'intérêt général) au profit d'un « surmoi automatique » (c'est une expression de Marcuse)
qui ne fonctionne que par la répression, et non plus par l'intériorisation - intériorisation à laquelle la puissance publique et symbolique a définitivement
renoncé : le citoyen est lui-même et en tant que tel devenu un consommateur auquel on inculque des réflexes conditionnés et que l'on contrôle par la peur du
radar automatique et la caméra de video-surveillance.
Mais on ne compte plus sur l'esprit civique parce qu'on n'en a plus soi-même.
Et en renonçant à l'intériorisation symbolique, on a aussi renoncé à la confiance - c'est à dire, au fond, à la paix civile.
De mode limite du fonctionnement social, la répression tend ainsi à devenir son mode ordinaire...
Ce dont la jeunesse a besoin, c'est une véritable perspective. Pour cela, il faut lui faire confiance, compter sur elle, faire appel aux compétences
qu'elle acquiert aussi dans ces situations si difficiles.
Aujourd'hui, 25% des jeunes sont au chômage, selon les estimations officielles. Faute d'un sursaut qui renverse la situation du tout au tout, nous
allons inévitablement au devant d'un conflit intergénérationnel majeur. »
Bernard Stiegler
extraits d'un article paru dans http://arsindustrialis.org/la-jeunesse-est-lavenir-de-l'homme,
signalé dans l'âge de faire, septembre 2010
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12 juillet 2010
LES HABITS
Je tricote des pensées à longueur d'hiver pour couvrir le dos refroidi de l'inexistence.
Les inhumains ont envahi la terre en convulsion. Ils ont pris les habits élégants des matadors et quelques-uns, encore plus déguisés,
des chapeaux à plumes de paon.
Il ne convient plus de babiller.
Dénouer les véritables mailles enfouies au coeur des chaleurs.
Nous, qui ne craignons point le froid passager, tisserons les habits futurs.
Guy Chaty
Parcours, Editinter 2002
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3 juillet 2010
Karl Marx Le Retour
J'ai écrit cette pièce à une période où l'effondrement de l'Union soviétique provoquait dans les grands médias et chez les leaders politiques une jubilation
quasi universelle : non seulement "l'ennemi" était mort, mais les idées du marxisme étaient discréditées. Le capitalisme et l'économie de marché avaient triomphé.
Le marxisme avait perdu. Marx était vraiment mort. Je jugeais donc important de montrer clairement que ni l'URSS ni les autres pays qui, se disnat "marxistes",
avaient installé des Etats policiers n'incarnaient la conception du socialisme de Marx. Je voulais montrer un Marx furieux que ses conceptions aient été déformées
jusqu'à être identifiées aux cruautés staliniennes. Je pensais qu'il fallait sauver Marx non seulemnt des ces pseudo-communistes qui avaient installé un ordre
répressif dans différents coins du monde, mais aussi de ces essayistes et de ces politiciens de l'Ouest qui s'extasiaient alors devant le triomphe du capitalisme.
Howard Zinn, professeur d'histoire politique à la Boston University
Pièce historique en un acte, Agone 2002
Traduit de l'anglais par Thierry Discepolo
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27 juin 2010
DIAMANT SANG NOIR
Ils étaient assis sur des richesses
énormes qu'ils ignoraient
debout sur une bombe
qui explosa dans le silence
de leur innocence on les chassa
de leur terre pour la transformer
en cratère crasseux de mine
à coeur ouvert
Ils sont devenus esclaves de blancs
pataugeant dans la boue grattant
pliés en deux la terre qui
les avait nourris et maintenant
les faisait mourir corps et âme
dans cet enfer
ignorant encore quel dieu ils servaient
ce veau toujours debout pour
les grands prêtres du fric posant
sur la peau satinée des belles héritières
habillées par les nobles couturiers
ces pierres de carbone montées dans le sol
de la Sierra Leone en cette Afrique pillée
diamant rouge du sang des noirs
Guy Chaty
Anthologie Attention travail, l'Harmattan 2010
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21 juin 2010
Comment ressuciter l'espérance ?
Comment ressuciter l'espérance ? Au coeur de la désespérance même...L'espérance est dans la convergence de ces courants qui parfois s'ignorent,
tels le commerce équitable, l'économie solidaire, la réforme de vie. De partout, les solidarités s'éveillent. Des associations se créent pour
suaver une rivière, repeupler un village, réinventer localement la politique. ça bouillonne. Sous les stuctures sclérosées, il y a dans notre
pays un formidable vouloir-vivre. Il n'y a pas de solution prête à l'avance, mais il y a une voie...
Edgar Morin
Hors-Série Le Monde page 95
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7 juin 2010
DERRIERE LES MIROIRS
Derrière les miroirs où
nous nous contemplions
avec suffisance,
des êtres lumineux
les poings fermés par la rage
raclaient le tain et
brisaient nos images
nous obligeant
à les voir
exister
Guy Chaty
revue Verso, n°141, juin 2010
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31 mai 2010
Toujours plus de pollution
« La réalité est parfois fort éloignée des discours sur le changement climatique et des engagements pris. C'est ce que prouve l'étude menée par
l'Agence européenne pour l'environnement sur le transport de voyageurs et de marchandises dans l'Union. L'étude qui porte sur la période 1997-2007,
contredit radicalement la volonté affichée de réduire les émissions à effet de serre. "Le transport des marchandises croît à un rythme un peu plus
rapide que l'économie avec une très forte hausse pour la route (+43%) et pour le fret aérien (+35%), alors que le fret ferroviaire et les voies navigables
intérieures voient leur part diminuer".
Pour le transport des passagers, la tendance n'est guère meilleure, c'est le trafic aérien qui explose, avec une
hausse de 48%, et la voiture qui reste reine avec 72% du total des déplacements. Ce sont donc les moyens de transport les plus polluants et les plus mauvais
pour le climat qui progressent. Du coup, les émissions de gaz à effet de serre du secteur transports augmentent de 28% et, côté polluants, le transport routier
demeure le plus gros émetteur d'oxydes d'azote. Au final, tous les efforts sur les technologies de véhicules plus propres ne parviennent pas à compenser
la pollution engendrée par le nombre croissant de passagers et de marchandises, et l'augmentation des distances parcourues.»
Que Choisir, n°482, juin 2010
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25 mai 2010
CIVILISATION
Roule l'édredon de la mer
s'affole et s'accroche
aux buissons d'épines
et les plumes
comme une écume folle
volent
au-dessus des déchets
Guy Chaty
Parcours, Editinter 2002
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19 mai 2010
En finir avec le chantage de la dette publique
« ...nous soutenons l'idée de taxer les grands créanciers (banques, assurances, fonds spéculatifs...mais aussi particuliers fortunés) à hauteur des créances qu'ils
détiennent. Cela permettrait aux pouvoirs publics d'augmenter les dépenses sociales et de créer des emplois socialement utiles et écologiquement soutenables.
Cela remettrait les compteurs financiers à zéro pour les dettes publiques au Nord, sans mettre à contribution les populations victimes de cette crise, tout en faisant
porter l'intégralité de l'effort sur ceux qui ont causé ou aggravé la crise, et qui ont déjà grassement profité de cette dette.
Il s'agirait en fait d'un virage radical vers une politique de redistribution de la richesse en faveur de ceux qui la produisent et non pas de ceux qui spéculent
dessus. Accompagnée de l'abolition de la dette extérieure publique des pays en voie de développement et d'une série de réformes ( notamment une réforme fiscale
de grande ampleur, une réduction radicale du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires, le transfert du secteur du crédit au domaine
public avec contrôle citoyen...), cette mesure pourrait permettre une véritable sortie de la crise dans la justice sociale et dans l'intérêt des peuples. Une telle
revendication, étrangement peu médiatisée, mérite d'être ardemment défendue.»
Damien Millet, Sophie Perchellet, Eric Toussaint
l'âge de faire mai 2010
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10 mai 2010
Le hold-up tranquille
« C'est le point aveugle du débat économique. Une donnée clé, et d'autant mieux cachée par les grands médias : de toutes les richesses produites
en France, les salariés récoltent, aujourd'hui, d'après l'Insee, 9,3 % de moins qu'en 1983 - autant qui va en plus aux actionnaires. Soit plus
de 100 milliards d'euros par an...»
Le journal FAKIR, hors-série 2010
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4 mai 2010
SUR LE BANC
Anatole est assis sur un banc. Il entend le bruit des combats, il voit au loin des hommes monter à l'échelle et tomber en criant,
repoussés par d'autres qui prennent leur place. Plus haut ils sont parvenus, plus rude est leur lutte.
Tout au long de l'échelle, les hommes se battent, regardant avec envie le visage étincelant de ceux qui sont installés au faîte.
Mais au fond d'eux-mêmes, les supérieurs s'ennuient secrètement et s'agitent pour éviter les crampes des mains ; pour un peu, ils redescendraient
volontairement jouer avec les autres.
Parfois, devant le banc, passent des isolés se cherchant querelle : ils ont perdu l'échelle mais n'ont pas oublié leurs rancoeurs.
Anatole se contente d'égarer les poursuivants en leur indiquant un mauvais chemin.
Guy Chaty
Anatole et son chat, IHV 1998 et Editinter/Bilingue 2004 (traduction Werner Rossade)
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29 avril 2010
Et si on commençait la démondialisation financière ?
« ...A moyen terme en tout cas, il est possible de préférer le passéisme de la délibération politique, dans laquelle les arbitrages de l'endettement
public seraient complètement réintégrés, à un monde mondialisé ébouriffant de modernité, dans lequel ce sont les marchés de capitaux qui fixent le tribut
prélevé sur la richesse nationale par des créanciers des quatre coins dumonde. Et il est possible de trouver quelque valeur à cette conclusion somme toute
assez simple : si la mondialisation n'est en définitive pas autre chose que la dissolution des souverainetés par la marchéisation de tout, alors démondialiser
c'est repolitiser. »
Frédéric Lordon
Le Monde diplomatique mai 2010
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16 avril 2010
S'HABILLER CHIC
Quand on est vieux, il vaut mieux s'habiller chic.
Chemise blanche, loden noir, chapeau. On marche doucement dans le métro, bien calé debout dans ses
habits fermes. On est fragile mais présentable.
Vu de derrière, la silhouette est respectable, les cheveux blancs sortent un peu du chapeau,
la verticale noire du manteau est irréprochable.
Vu de devant, le regard est lointain, le col immaculé, le foulard ajusté, la canne ajoute encore
à la dignité.
Quand on est vieux, il vaut mieux...avoir les moyens.
Guy Chaty
La vie en raccourcis Edition Clapàs, 2002
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12 avril 2010
L'État managérial
« ...Michaël Foessel analyse le rôle déterminant joué depuis trois ans par la "RGPP", la
revision générale des politiques publiques. Appliquant à
l'action de l'Etat, de ses territoires, de ses universités, hôpitaux et juridictions, "les impératifs
concurrentiels à l'oeuvre sur le marché" (performance,
rentabilité et évaluation), cette démarche conduit, note-t-il, à faire de l'Etat "le meilleur instrument
au service du marché". Et Myriam Revault d'Alvonnes d'ajouter
que l'Etat est ainsi "transformé en Etat managérial", au détriment des dynamiques conflictuelles qui
sont au coeur de la démocratie... »
Gérard Courtois, à propos de la revue ESPRIT, mars-avril 2010
Le Monde,11-12 avril 2010
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Le coût du nucléaire
« Il est communément admis que la production d'un kilowatt d'origine nucléaire est la moins chère du marché de l'énergie. Soit ! Cela est sans doute véridique
avec le mode de calcul retenu pour en évaluer atificiellement le coût. En effet, en sont exclus les budgets faramineux de recherches, depuis des décennies,
suventionnées par le ministère de l'industrie, les coûts de la surveillance policière et des services spéciaux (protection des sites et des convois qui sillonnent
le territoire), imputés au ministère de l'intérieur, voire à celui des armées. A cela il faut ajouter la gestion des déchets pendant des millénaires et le démantèlement
aléatoire des installations contaminées (cinquante ans environ pour neutraliser la dangereusité d'un site), avec un provisionnement financier prévu à minima qui
ne pourra que s'alourdir.»
Jean-Louis Renou, Quibou (Manche), Courrier des lecteurs
Le Monde,11-12 avril 2010
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2 avril 2010
RACISME CHEZ LES SQUELETTES
Incroyable. Le racisme s'est infiltré chez les squelettes. Jusqu'ici, ils étaient apparemment semblables mais certains ont voulu introduire des différences.
Ils ont fait remarquer que les crânes humains avaient des formes très variées. Alors, beaucoup ont vérifié cette assertion en regardant attentivement leurs
co-morts.
Les squelettes mécontents de leur sort ont trouvé ainsi le moyen d'affirmer leur personnalité en jouant sur la distinction. Ils ont formé
des groupes qui se
revendiquaient d'une même identité. On eut ainsi les petits crânes, les gros crânes, les crânes ronds, les crânes plats, les crânes bosselés à gauche, les crânes
bosselés à droite...les crânes trépanés, les crânes avec un trou, les crânes avec deux trous - la place des trous ayant leur importance,...
Et évidemment, chaque groupe se pense meilleur que les autres : il se trouve plus distingué.
Pour prouver leur supériorité, certains groupes en viennent aux mains. Il y a des alliances, des renversements d'alliances, des traîtrises, des attaques par
surprises, et des traités de paix pour se donner le temps de rassembler ses os.
Ceux qui sont nés squelettes avec des os fragiles ou cassés sont les plus maltraités. Les autres s'allient facilement contre eux. Ce sont les seules occasions
où
les groupes s'entendent : ils enferment ces ''chiens d'os ramollis'' comme ils les appellent, dans des camps de rétention dits ''ossuaires'', et en font parfois
des fricassées d'os.
Il est des squelettes plus calmes qui avertissent du danger de disparition de tous. Ils lancent des avertissements : « continuez ainsi et vous ne ferez pas de
vieux os ». Mais ils ne semblent pas très écoutés.
Guy Chaty
Comme en poésie, n°40, décembre 2009
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31 mars 2010
L'abstention
« L'extension du chômage et de la précarité ont des effets plus ou moins indirects sur la démobilisation électorale. Le travail est traditionnellement
un lieu de socialisation politique. Jusqu'au début des années quatre-vingt, il était un des lieux d'encadrement politique pour les milieux populaires. Plus il y a
de salariés qui échappent à ce cadre-là, moins il y a de chance qu'ils s'intéressent à la politique et aillent donc voter...
Le faible tôt de votants pose...un réel problème de légitimité des élus. Il faudra bien qu'ils prennent conscience de cette situation...»
Céline Braconnier, maître de conférences en sciences politiques à l'université de Cergy
L'humanité, 25 mars 2010
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22 mars 2010
LENTEUR
Jour finissant
tièdeur
village lorrain
rue
vieille qui revient des champs
la lenteur des chevaux
et des choses comme ça
Guy Chaty
Parcours
Editinter 2002
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11 mars 2010
La violence à l'école
« En inscrivant "la légitimité" du maître dans le cadre plus général des liens intergénérationnels indispensables à la bonne construction de la personnalité
et en démontrant comment procède le marketing pour rompre cette relation afin de "capter l'attention" des jeunes générations dans le but de "canaliser leurs désirs
et leur libido" vers la seule consommation matérielle, Bernard Stiegler (http://www.arsindustrialis.org/audio?page=2) éclaire le débat. Le problème est général,
la prolétarisation de tous est en marche, ruinant l'école, infantilisant les adultes et sapant toute autorité entre les âges...
La violence à l'école n'est donc que la partie peut-être la plus choquante, la plus inquiétante aussi, d'un processus de marchandisation générale de la vie, faisant
des ravages dans ce qui connstitue nos cultures et a fait avancer les civilisations. C'est encore les effets de la domination des puissances d'argent sur nos
existences qui se manifestent dans les écoles et jusqu'où iront-ils si nous laissons faire ? »
Alain Duez
l'âge de faire, mars 2010